En cinq participations aux 24 Heures du Mans, Manu Rodrigues a rallié l’arrivée à quatre reprises, trois fois chez JMB Racing, une fois chez Larbre Compétition. Son seul abandon reste 2010 au volant d’une Audi R10 TDI du team Kolles. Le Franco-Portugais est le seul vrai gentleman à avoir piloté une Audi LM P1 au Mans si on prend en compte que Scott Tucker, son coéquipier en 2010 (avec Christophe Bouchut), passait une grande partie de son temps dans une voiture de course. Son dernier départ remonte à 2013 sur une Corvette C6.R/Larbre Compétition. Membre du Club des Pilotes des 24 Heures du Mans depuis ses débuts dans la Sarthe, Manu Rodrigues compte bien remettre le couvert en 2017 afin de ne pas laisser ses petits camarades de jeu en découdre sans lui.

Être inscrit au Club des Pilotes des 24 Heures du Mans est important ?

« Je pense que tout pilote qui participe au moins une fois aux 24 Heures du Mans devrait être inscrit. Pour ma part, j’ai rejoins le Club dès 2011, année de ma première participation. Quand on ne pilote pas, c’est un endroit où il fait bon vivre, cela permet de faire des rencontres et de parler de la course. Le Club des Pilotes est très convivial et la vue depuis le club house est juste magique. »

Participer aux 24 Heures du Mans a toujours fait partie de vos envies ?

« Cela fait longtemps que j’en rêvais. Hexis Racing avait fait une demande en 2008, mais l’équipe n’a pas été retenue. Philippe (Dumas) m’a aidé à trouver un baquet en 2009 chez JMB Racing et c’est comme cela que l’aventure mancelle est partie. Je viens aux 24 Heures du Mans depuis la fin des années 80 et cette course a toujours été un objectif pour moi. Un jour, il fallait que j’y roule. Avant cela, je me suis fait les dents avec Hexis en GT3. J’ai voulais y aller une fois et j’en suis à cinq participations. Mon objectif est toujours de revenir au Mans. »

Le faire au volant d’une Audi R10 TDI reste quelque chose d’inoubliable ?

« C’était exceptionnel ! Quel gentleman peut dire qu’il a participé aux 24 Heures du Mans sur une Audi LM P1 ? En 2009, je roulais chez JMB Racing avec Christophe Bouchut et c’est lui qui m’a demandé si j’étais intéressé par un volant en LM P1. J’en ai discuté avec Philippe (Dumas) qui faisait son possible pour me placer chez Luc Alphand Aventures. Avant Le Mans, je n’avais disputé qu’une seule journée d’essais au Paul Ricard, ce qui est très peu pour appréhender un tel monstre. »

L’Audi R10 TDI était facile d’adaptation ?

« Entre les essais du Paul Ricard et mes débuts au Mans, j’ai eu l’impression d’avoir deux autos totalement différentes. Je n’ai jamais fait de monoplace et j’avais trouvé l’auto assez facile au Paul Ricard. Au Mans, elle était complètement déchargée et là ce n’est plus la même histoire. Les deux mondes sont totalement différents. C’est compliqué pour un pilote comme moi venant du GT. Il y a eu beaucoup de critiques après Le Mans. Les gens n’étaient pas dans l’auto à ma place. J’en ai ch*** mais j’y retournerais sans état d’âme. La puissance n’était pas un problème. Gérer la température des pneumatiques était le gros sujet car chauffer des pneus de P1 est compliqué. Aucune comparaison possible avec une GT3. De plus, je n’ai quasiment pas roulé en essais au Mans. Après trois tours, j’étais qualifié et mes coéquipiers ont  fait le reste du roulage. Rouler en LM P1 au Mans est le point culminant dans la carrière d’un gentleman. »

A l’origine, l’idée était de le faire avec Hexis Racing et l’Aston Martin DBR9…

« C’est l’un de mes regrets de ne pas pu avoir concrétisé cela en 2009 avec Hexis Racing. C’était le rêve avec l’équipe idéale. Il y a avait Fred Mako, Julien, mon neveu, et moi. Je pense que nous aurions assisté à un grand moment, peut-être même plus grand qu’avec la LM P1. Hexis, c’était un petit commando à qui rien ne faisait peur même si Le Mans reste Le Mans. Quand on voit le travail fourni par Philippe Dumas en LM P2, on ne peut pas s’empêcher de penser que Hexis aurait brillé au Mans. »

Il y a tout de même eu Le Mans 2013 avec Larbre Compétition et Philippe Dumas…

« L’aventure Larbre Compétition était très belle. L’encadrement était exceptionnel. C’est le meilleur encadrement qu’un pilote peut avoir au Mans. Certes, j’ai eu de meilleures autos avec JMB Racing car la Corvette était fortement pénalisée. Jack (Leconte) est très près de ses pilotes. Il connaît le moindre détail sur le bout des doigts. Il ne va pas hésiter à se pénaliser en début de course pour être bien sur la fin. Jack Leconte est un grand Monsieur de l’Endurance. »

Rouler au contact d’une pointure comme Fred Makowiecki a été un vrai plus ?

« Je peux dire que c’est mon mentor. Fred fait partie indéniablement des références mondiales et il n’est jamais avare de conseils. C’est l’exception. Un gentleman apporte souvent une part du budget pour avoir un professionnel à ses côtés. Fred, c’est le coéquipier rêvé et si c’était à refaire, ce serait la même chose les yeux fermés. Même si on ne roule plus ensemble, le contact n’a pas été rompu, ce qui est rare dans ce milieu. Il m’a fait progressé et sans lui, il n’aurait pas été possible de faire tout cela. Je regrette tout de même de ne pas avoir pu faire Le Mans à ses cotés. »