Bonjour à tous,
Après quelques semaines de repos et de détente puis un retour victorieux en Algarve, me voici de retour avec ce Laurens’ World qui me permet de partager des choses plus profondes avec vous.
Ces vacances m’ont fait beaucoup de bien je dois dire. J’ai fait du karting, du jet-ski, du paintball… Toutes des activités qui m’ont permis de déconnecter et de penser à autre chose qu’au sport automobile. Même si, forcément, ça reste toujours dans un coin de la tête… Surtout que, comme vous le savez, les Total 24 Heures de Spa n’ont pas répondu à mes attentes et j’étais très fâché sur moi-même d’être sorti de la route samedi soir.
Un journaliste m’a demandé pourquoi je faisais plus d’erreurs cette année que les saisons précédentes. J’ai bien dû admettre qu’il n’avait pas tout à fait tort… J’ai fait de très bonnes choses en 2015, mais j’ai aussi commis trois erreurs : une à Brands Hatch, une à Moscou et une aux 24 Heures. Comme je n’aime pas commettre la même faute, j’ai évidemment cherché à comprendre.
Comme tout pilote de course, je pense être quelqu’un qui a vraiment la compétition dans le sang. Je veux gagner et je veux être le meilleur, tout le temps. Mes proches savent que, si quelqu’un va plus vite que moi avec une Audi, je ne suis pas content. Il faut dire aussi que tout est allé très vite pour moi depuis mes débuts en GT, en 2012. J’ai rapidement gagné des courses, je suis devenu très vite pilote officiel Audi et les journalistes m’ont rapidement catalogué parmi les meilleurs pilotes du monde en GT. Ce qui fait forcément très plaisir, mais ce qui te pousse aussi à toujours donner plus ! Je pense que je cherche parfois trop à fournir une performance exceptionnelle alors que, comme son nom l’indique, une performance exceptionnelle ne peut pas se produire chaque week-end… Mais en voulant trop chercher la limite et en voulant parfois la repousser, je me suis parfois fait surprendre.
Je suis encore jeune et je pense que ces erreurs doivent m’apprendre qu’il ne faut pas se tromper d’objectif. Bien sûr, je veux toujours être le plus rapide tout le temps ! Mais parfois, il faut pouvoir se concentrer uniquement sur la victoire finale, ce que j’aurais dû faire à Spa… Je peux vous dire que cette erreur là, elle n’est toujours pas tout à fait avalée !
Commettre une erreur fait toujours mal à l’amour-propre, mais c’est aussi ce qui permet d’apprendre et de grandir. Même si je ferai encore des fautes, il ne faut en tout cas pas reproduire le même scénario. A Portimao, quand je me suis retrouvé en tête devant Markus Winkelhock, j’étais partagé entre l’envie d’assurer la victoire et la volonté de montrer que je pouvais toujours être le plus rapide au volant d’une R8 LMS ultra. Et finalement, j’ai fait un mix des deux en faisant tout de même un tour très rapide en fin de course pour montrer que je contrôlais la situation. Mais l’essentiel, c’était le succès au bout de la course.
Ces derniers temps, on m’a souvent parlé des limites de la piste. C’est vraiment un problème de plus en plus marqué en sport automobile avec des circuits qui offrent de plus en plus souvent des dégagements asphaltés. En tant que pilote de course, deux choses me plaisent dans le sport automobile : la volonté d’être le meilleur, donc la compétition, et l’adrénaline que l’on peut ressentir au volant de nos voitures de course. C’est aussi le fait de jouer avec la limite et de prendre certains risques qui est intéressant dans ce métier.
Quand tu roules sur des pistes comme Brands Hatch, Zandvoort ou la Nordschleife du Nürburgring, tu sais que la moindre erreur peut avoir des conséquences importantes, pour la voiture ou pour toi. Dès lors, quand tu fais vraiment un tour à 100% sur un tel tracé, le plaisir ressenti est énorme ! Par contre, le même tour à Portimao, au Paul Ricard ou même, dans une moindre mesure, à Francorchamps, ne te donne pas les mêmes sensations. Si tu te loupes un peu au Raidillon ou à Blanchimont, il suffit d’élargir la trajectoire et tu te dis que tu réessayeras le tour d’après.
Vincent Vosse me racontait que, il y a dix ans, ceux qui passaient Blanchimont vraiment à fond étaient des héros car il y avait le bac à gravier puis le mur de pneus qui n’étaient jamais loin.
D’une certaine manière, on pourrait dire que les circuits modernes sont devenus trop sûrs. Attention, je ne dis pas qu’il faut des blessés et des morts. Mais le sport auto ne doit pas être un jeu de Playstation. Il faut qu’il reste quelque part la peur de se faire mal… C’est ça qui donne des émotions aux pilotes, mais aussi aux spectateurs !
Si les circuits ne comprenaient pas ces immenses dégagements asphaltés, les pilotes s’adapteraient aussi en conséquence. D’ailleurs, je ne pense pas que l’on peut dire qu’il y a plus d’accidents graves sur des circuits en ville ou des circuits moins modernes. Pourquoi ? Parce qu’en tant que pilote on aborde la piste avec plus de respect. On augmente le rythme pas à pas et nous sommes plus humbles. Alors que quand tu arrives au Paul Ricard, tu peux tout tenter dès ton premier tour puisque tu peux toujours élargir la trajectoire si tu dépasses la limite.
Au-delà même de l’émotion ressentie, on constate que les limites de la piste causent de plus en plus de problèmes au moment de gérer les courses avec des dépassements qui se font au-delà des limites et qui sont parfois pénalisés, mais pas toujours.
Y’a-t-il une solution ? Je ne sais pas. Pour maintenir la sécurité, je serais plutôt favorable au fait qu’il faut des murs qui amortissent bien les chocs tout en continuant à développer aussi la sécurité passive des voitures, avec des bolides qui supportent bien les chocs et des cockpits toujours plus solides. Ce n’est évidemment que mon avis, mais j’avais envie de le partager avec vous.
Merci de m’avoir lu et rendez-vous au Nürburgring pour la finale de la Blancpain Endurance Series. J’espère vous y voir nombreux et que nous pourrons y fêter le titre du Belgian Audi Club Team WRT chez les teams et les pilotes.
A bientôt.
Laurens