En 2006, lorsque Stéphane Ratel a lancé le GT3, l’idée était simple : huit modèles, une réglementation visant à équilibrer au maximum les performances avec du lest, un restricteur et une hauteur de caisse variable. Dès le début, l’objectif était d’empêcher la flambée des coûts et de rendre le pilotage plus accessible. Avec plus de 40 autos dès la première saison, le succès était garanti avec un accès privilégié aux gentlemen. « Priorité aux amateurs » martelait à l’époque le président de SRO. Pourtant, lors du coup d’envoi à Silverstone, on voyait en découdre : Klaus Ludwig, Sean Edwards, Morgan Moullin-Traffort, Gilles Duqueine, Anthony Reid, Allan Simonsen, Marco Cioci, Steve Zacchia, Jean-Luc Blanchemain, Patrick Bornhauser, Raymond Narac, Jean-Luc Beaubelique, James Ruffier, etc… Dans chaque équipage se trouvait un jeune en devenir et un gentleman. Les équipes avaient elles aussi fière allure : Larbre Compétition, Sofrev-ASP, Reiter Engineering, Barwell, BMS, Racing Box, JMB Racing, GPC Sport ou AF Corse.
Huit ans plus tard, six des huit marques sont encore là : Aston Martin, Corvette, Dodge, Ferrari, Lamborghini, Porsche. Ascari et Maserati ont jeté l’éponge, de même qu’Alpina qui reste en dehors des championnats majeurs pour le moment, mais aussi Morgan. D’autres sont arrivées : Audi, Bentley, BMW, Chevrolet, Ford, Jaguar, McLaren, Mercedes, Morgan, Nissan. La liste n’est pas encore complète puisque Lexus va débuter en 2015 et on sait de source sûre qu’au moins trois constructeurs réfléchissent à proposer une GT3 à moyen terme. Phénomène de mode à sa création, la catégorie GT3 est devenue un vrai succès populaire avec des autos qui n’ont plus rien à voir avec celles des débuts. D’une GT de route améliorée, on est passé à une vraie voiture de course capable d’aligner les tours sur 24 heures à un rythme endiablé. Ce qui était initialement prévu pour les gentlemen et les jeunes pilotes s’est professionnalisé au fil des ans. Alors que le championnat FIA-GT3 commençait à s’essouffler, le salut de la catégorie est venu de Blancpain avec le lancement de la Blancpain Endurance Series et les 24 Heures de Spa en point d’orgue.
![]() FIA-GT3 2006 |
![]() Total 24 Heures de Spa 2014 |
Bien avant le lancement du team WRT, Vincent Vosse nous expliquait tout le bien qu’il pensait du GT3, à une époque où on ne jurait que par le GT1 et GT2. Vincent avait vu juste puisque les GT3 sont maintenant acceptées quasiment partout dans le monde avec des autos dont les chronos n’ont cessé de s’améliorer au fil du temps. De 2.27.1 à Spa en 2006 (avant la réfection du Bus Stop) avec Fred Bouvy sur une Dodge Viper Competition Coupe, on est passé à 2.18.710 cette année, chrono de référence réalisé par Laurens Vanthoor sur une Audi R8 LMS ultra.
Les constructeurs ont bien compris l’utilité d’avoir un service compétition-client où une vraie guerre des prix s’est vite engagée. Quand une Audi R8 LMS coûtait 298 0000 euros, une R8 LMS ultra frôlait les 330 000 euros lors de son lancement. Chez Aston Martin, une DBRS9 était vendue 300 000 euros contre 325 000 à une V12 Vantage GT3. La Ferrari 458 Italia GT3 était affichée il y a quelques années à 350 000 euros, la BMW Z4 GT3 à 315 000 euros, la Mercedes SLS AMG GT3 à 343 000 euros et la McLaren MP4-12C à 325 000 euros. La McLaren 650S GT3 va dépasser allègrement les 400 000 euros. On est encore assez loin des prix des GTE, notamment de la Porsche 911 RSR dont avoisine les 850 000 euros.
![]() FIA-GT3 Monza 2008 |
![]() Blancpain Endurance Series Monza 2013 |
Rouler en GT3 donne des avantages, aussi bien sur le plan de la revente que de l’amortissement. Il n’y a guère que deux championnats majeurs qui font de la résistance aux GT3 avec le Championnat du Monde d’Endurance et le Tudor United SportsCar Championship, même si ce dernier accepte les autos moyennant quelques modifications.
On attendait une convergence GT mais celle-ci semble avoir du plomb dans l’aile pour le moment mais le FIA WEC et le TUSC vont-ils pouvoir résister à la pléiade de constructeurs présents en GT3. On croit savoir que le championnat américain pourrait céder sous peu sachant par exemple qu’Audi ne compte pas développer un modèle spécifique de sa nouvelle R8 pour le marché américain. Le Pirelli World Challenge séduit de plus en plus, ce qui appelle le TUSC à réfléchir à l’avenir de la catégorie GTD.
![]() Monza 2008 |
![]() Paul Ricard 2014 |
Alors à quand les GT3 au Mans ? En l’état actuel des choses, ce n’est pas pour demain. Porsche, Ferrari, Aston Martin et Corvette se satisfont d’avoir des GTE au catalogue afin de montrer une vitrine technologique répondant à un cahier des charges, avec des GTE tout de même soumises à une BOP tout comme les GT3 qui elles n’ont pas de réglementation technique. Bentley souhaite revenir au Mans mais n’a pas de GTE à son catalogue, tout comme McLaren et Nissan. Les GT3 sont devenues tellement bodybuildées que les non initiés ont du mal à faire la différence entre une Ferrari F458 Italia et une 458 Italia GT3.
![]() FIA-GT3 Silverstone 2006 |
![]() Blancpain Endurance Series Silverstone 2014 |
Avec des GT3 qui tournent maintenant aussi vite que des GTE, pourquoi ne pas réunir les deux en une seule catégorie GT. Le sujet est bien d’actualité mais les avis divergent. Les pilotes professionnels vous diront qu’une GTE est nettement plus « jouissive » à piloter qu’une GT3.
Le développement moteur est ce qui coûte le plus cher dans une GTE. Pourquoi dépenser autant d’argent pour avoir des brides minuscules ? Juste pour ne pas que les GT aillent taquiner les LM P2. A titre de comparaison, le meilleur chrono d’une GTE au Mans (2014) était de 3.54.754 contre 3.55.266 au pilote le moins rapide en LM P2. Avec 100 cv de moins, les GTE arrivent à tourner dans les mêmes chronos qu’une GT3.
On a donc deux philosophies qui s’affrontent mais croyez-nous, cette histoire de convergence GT n’est pas terminée…