Lorsqu’elle est apparue pour la première fois dans sa robe noir carbone, la Renault Sport R.S. 01 a fait penser à un avion furtif. Rapide, exclusive, mi proto mi GT, la dernière née couvée par Renault Sport et développée notamment par Alex Prémat est attendue dans un championnat monotype dans le cadre des World Series by Renault. A quelques jours de la présentation officielle de la série badgée Renault, la grille de Renault Sport R.S. 01 n’est pourtant pas complète. On attendait dix teams et 20 autos pour la première année de l’auto en compétition. Depuis peu, Renault Sport souhaite élargir le panel en faisant rouler la R.S. 01 dans d’autres championnats avec la mise en place d’une BOP. Présent à Magny-Cours lors des essais VdeV Endurance Series, Jean-Pascal Dauce (directeur de la compétition chez Renault Sport) nous a accordé un long entretien. Ce passionné de la marque au losange et d’Alpine où il a officié n’a éludé aucune question avec le pourquoi du comment de cette R.S. 01, l’intérêt de Renault pour le sport automobile et la volonté de voir cette nouvelle Renault aux quatre coins du monde.
La Renault Sport R.S. 01 est prête à rouler en compétition ?
« Le développement est maintenant terminé depuis la fin décembre dans sa configuration World Series by Renault. Tout est prêt : fiabilité et performance. Nous avons bouclé plus de kilomètres qu’en une année de compétition. Le choix a été fait de confier l’auto à des pilotes ayant des références variées afin de ne pas tomber dans le piège d’une auto typée pour un seul profil de pilote. Les retours sont bons. Nous avons décidé de faire rouler assez tôt des gentlemen, justement pour avoir plus de données. Un seul châssis a roulé durant la phase de développement. La construction des autos débute actuellement. Les dix premières seront livrées ensemble chez Dallara où sera organisé un shakedown. »
On sent bien qu’elle ne laisse pas indifférente…
« La Renault Sport R.S. 01 fait l’unanimité. Elle est un peu en marge avec son moteur issu de la série et plus précisément de la Nissan GT-R. On veut garder la fiabilité avec une auto très performante et facile d’utilisation. Tous les pilotes qui ont testé la R.S. 01 sont ressortis enthousiastes, et ce même avec un pilote actuel de Formule 1. Nous sommes convaincus d’avoir une auto polyvalente où chacun se sent à l’aise. En conclusion, le développement a été très bon et je tiens à remercier toute l’équipe et les fournisseurs. Aucune sortie de piste n’a été constatée et tout le monde s’est montré positif sur la tenue de route et l’embrayage centrifuge pour des départs des stands plus faciles. »
« Il faut un certain temps d’adaptation. On ne remplace pas une formule dans un court laps de temps d’autant plus qu’il y a eu une interruption. On assume cette rupture d’offre. Le produit est au-dessus du niveau de la Megane. A nous de séduire les gens et la confiance est de mise sur le plateau même s’il est encore un peu tôt pour donner un chiffre sur le nombre d’autos. »
Le produit Renault Sport R.S. 01 semble compliqué à placer à mi-chemin entre une GT3 et une DTM. C’est aussi votre avis ?
« Déjà, il faut savoir que le développement a été concentré pour les World Series by Renault. On commence juste à travailler sur une BOP et le premier jet est que l’auto est moins rapide d’environ 3 secondes face à une GT3. Le but est d’avoir quelque chose de peu onéreux pour rouler dans d’autres championnats. On ne veut pas jouer sur la cartographie. Le travail est fait sur l’aéro, les freins et le poids. Nous voulons rassurer les clients potentiels sur le fait que l’auto pourra rouler dans d’autres séries. Cette R.S. 01 est vue comme un avion furtif qui va vite. J’ai bien conscience que les discussions se sont enflammées après les premiers essais, comme quoi elle était plus rapide qu’une GT3. Il faut maintenant discuter avec les promoteurs. »
Est-il prévu de voir la R.S. 01 sur d’autres continents ?
« Je rêve de voir un championnat en Asie. La Chine est un marché important pour Renault. Nous avons déjà signé un accord avec un promoteur local pour la Clio Cup et la Formule Renault 2.0. Nous allons suivre de près l’évolution des choses pour voir si la R.S. 01 peut s’inscrire dans le schéma. Le SUPER GT avec sa catégorie GT300 peut aussi nous intéresser. Pour ce qui est des Etats-Unis où Renault n’est pas présent directement, il n’y a pas d’intérêt commercial sur le court terme. Cependant, il n’est pas exclu de voir la voiture en fonction de l’intérêt. Il faut discuter avec les promoteurs du Pirelli World Challenge et du TUDOR. Cela peut aussi faire venir de nouveaux pilotes en World Series by Renault. En revanche, il n’est pas prévu de badger l’auto Nissan pour ne pas troubler l’image. Il est encore trop tôt pour mettre en place une antenne Renault Sport sur le continent américain. »
Pourquoi ne pas avoir lancé directement une GT3 ?
« Cela n’a échappé à personne qu’aucune GT ne figure dans la gamme Renault. Ce n’est pas notre philosophie et ce serait un non sens. Renault propose de très belles RS. Bien sûr, à titre personnel, j’en ai rêvé. L’idée est donc de faire rouler l’auto dans divers championnats même si nous avons conscience que toutes les séries ne l’accepteront pas. Pourquoi pas voir le championnat Renault Sport R.S. 01 au sein d’un meeting GT à l’avenir. Un projet est à l’étude pour organiser une course d’endurance d’ici la fin de l’année où l’on retrouverait des Renault Clio Cup sur 3 heures et des Renault Sport R.S. 01 sur 9 ou 12 heures. D’autres autos telles que des GT3 seraient acceptées avec deux classements à la clé. »
Est-il utopique de voir des Renault R.S. 01 en ouverture des 24 Heures du Mans ?
« (sourire). Je peux juste dire que l’idée me plaît… »
Renault s’intéresse à la catégorie LM P1 compte tenu du nouveau règlement ?
« Renault F1 a regardé la pertinence de pouvoir utiliser un moteur F1 avec récupération d’énergie. Cela ferait une bonne base pour un moteur LM P1. Il y a eu des discussions. La problématique est que la F1 optimise tellement ses paramètres que cela pourrait poser un souci en termes de coût. Un engagement n’est pas prévu à court terme. »
Voir Alpine en LM P2 est une belle satisfaction ? Quid d’un moteur badgé Renault dans la catégorie ?
« Voir Alpine en Endurance est vraiment positif pour une marque qui renaît. Signatech-Alpine fait du très bon travail et je me réjouis de les voir en FIA WEC après deux titres européens. Pour la question de voir Renault en tant que motoriste LM P2, rien n’est exclu. Pourquoi pas si nous avons une bonne base à l’avenir. Tout est une question d’opportunité. Toutefois, ce n’est pas dans notre stratégie d’aujourd’hui. De plus, Nissan est activement présent avec le succès que l’on sait. »
Renault restera donc présent en sport automobile ?
« Il n’est pas question d’arrêter le sport automobile. Cela fait partie de l’histoire de Renault dès la création de l’entreprise par Louis Renault qui a d’ailleurs perdu son frère lors d’une course. On travaille toutes les pistes intéressantes. Pour en revenir à la Renault Sport R.S. 01, pourquoi pas la voir en #00 aux 24 Heures du Nürburgring avec un engagement de Renault Sport afin de voir comment elle se comporte. Notre meilleure valeur est que nos pilotes soient satisfaits… »