Avoir une Balance de Performance parfaite relève de l’utopie. Au mieux, on peut s’en rapprocher et contenter un maximum de personnes. Ce qui est valable en GT3 l’est aussi en GTE ou LMP. Au fil des ans, il est devenu impossible de développer la meilleure auto au risque de se faire pénaliser. On ne va pas aller jusqu’à dire que la BOP gangrène le sport automobile mais nous n’en sommes pas vraiment loin. Que l’on appelle ça une Balance de Performance ou un Equilibre de Performance, cela revient au même. Il sera toujours impossible de contenter tout le monde. Il n’y a guère qu’en sport automobile où on donne des dérogations, où on pénalise ceux qui gagnent, où certains ne montrent pas tout avant les grands évènements. Et le sport dans tout ça ?
Il est déjà compliqué d’étalonner les autos d’une même catégorie, alors quand en plus il faut équilibrer des autos de catégorie différente qui concourent dans une seule classe augmente le challenge. Le principe même d’une Balance de Performance est de donner sa chance à tout le monde. Cela n’empêche pas d’avoir des chronos ultra serrés dans des championnats où roulent des autos de conception différente. Au final, le sport est bien là…
Au lieu d’étalonner uniquement les autos selon les modèles, si la solution passait par une BOP en fonction des circuits. C’est ce qu’a décidé de mettre en place SRO en Blancpain GT Series : circuits lents, rapides, à fort appuis. Nous ne sommes qu’au début du processus, si bien que l’on va attendre avant d’avoir un avis tranché sur la question.
Nous avons demandé l’avis d’un ingénieur bien connu des différents championnats GT3 (France, Allemagne, Europe, FIA GT Series, Blancpain GT Series), à savoir Renaud Dufour, qui officie avec succès chez HTP Motorsport.
« Nous n’avons été mis au courant que tardivement de cette arrivée d’une BOP variable selon les circuits » nous confie Renaud Dufour. « Sur le papier, c’est une bonne chose car j’ai toujours pensé qu’il fallait aller vers ce genre de concept au lieu de révolutionner les choses entre deux meetings. C’est selon moi une bonne idée de le faire maintenant car on connaît bien les autos. Il ne faut pas que cela tourne en balance de résultats. »
Que ce soit à Monza (Blancpain Endurance) ou Nogaro (Blancpain Sprint), les Mercedes SLS MG GT3/HTP étaient strictement dans la même configuration : « Pour nous, l’auto était la même aussi bien en essais libres qu’en qualifications. Il ne faut pas regarder que le résultat final. Sincèrement, Claude Surmont et son équipe font du bon travail. »
Si la majorité des GT3 actuelles sont sur le marché depuis plusieurs saisons, plusieurs marques vont renouveler leur monture à moyen terme. Ce sera le cas d’Audi, BMW, Lamborghini, Porsche ou Mercedes. « Cela va compliquer la donne si des constructeurs arrivent avec de nouvelles autos en 2015 » poursuit l’ingénieur HTP Motorsport. « Il faut du recul pour mettre en place une BOP variable en fonction des circuits. La BOP selon l’aéro est tout de même une bonne chose. Lors du premier meeting ADAC GT Masters de l’année, nous avions une Mercedes supérieure à 1,5t, pilote et essence compris. Rajouter 20 kg à une auto revient à perdre environ 1 seconde. En 2013, la BOP établie en Blancpain Endurance Series était bonne. Sur des tracés comme Spa ou le Nürburgring, elle nous était assez favorable. La Mercedes a pris 15 kg cette année, et aussi bien à Monza qu’à Nogaro, nous étions à 1s de la pole. Il est impératif d’avoir une BOP initiale correcte. »
Selon Renaud Dufour, il y a un vrai intérêt d’avoir une BOP variable : « Cela permettra aux autos qui ne peuvent rien espérer sur un circuit donné de s’en sortir. Il faut ôter les extrêmes. Il est clair qu’une BMW Z4 GT3 doit être avantagée sur un circuit comme Monza. C’est la même chose pour la Mercedes à Baku où à la régulière, il n’y a aucune chance de bien figurer. On parle peu de construction de voiture. Il y a des différences majeures entre les moteurs situés à l’avant ou à l’arrière. Sur un circuit comme Nogaro, il est impossible de voir une auto d’1.3t d’environ 5 mètres de long et 2 mètres de large d’être aussi rapide qu’une auto à moteur central. Cela va au-delà du poids. A mon avis, ce facteur n’est pas assez pris en compte. »
Rencontré dans le paddock des 6 Heures de Spa, nous avons posé la question à Vincent Vosse, team principal du Belgian Audi Club Team WRT, sur la mise en place de cette BOP variable : « Je pense que cela va dans le bon sens. Il est un peu tôt pour se prononcer mais si on peut éviter de revoir les mêmes problèmes que l’année passée où nous avions mis en avant que l’Audi était désavantagée. Il avait fallu attendre plusieurs courses pour voir une rectification. »
Depuis quelques années, la règle des 65 minutes par relais a été mise en place aux 24 Heures de Spa, de même qu’un Test Bronze repris par d’autres championnats et une catégorisation de pilotes repensée pour une meilleure équité. Comme quoi la BOP ne se fait pas uniquement sur les autos…