Tout est parti d’une discussion aux 24 Heures de Spa avec Georges Kaczka « Un jour, il faut que tu viennes essayer le simulateur chez AOTech. » Depuis, le temps a passé mais il aurait été dommage de ne pas profiter d’une visite chez ART Grand Prix pour se rendre le lendemain chez AOTech à St Pierre du Perray. Ce simulateur restait pour moi une énigme. Pour en avoir parlé avec Guillaume Moreau, Bertrand Baguette ou Antoine Leclerc, tous m’avaient bien précisé que ce n’était pas un jouet pour gamers mais bien un outil de travail pour pilote. N’étant ni pilote ni gamer, à quoi devais-je m’attendre ? Chez DAMS, j’avais quelque peu mystifié une WSR 3.5 dans le Raidillon. Chez Kinetic, j’ai réussi à mettre une ORECA 03 sur le toit. Vous me direz, ce n’est pas trop grave car il suffit de faire un reset et ça repart. Sauf qu’avec AOTech Simulator, on entre dans la quatrième dimension…
AOTech n’est pas seulement un simulateur puisqu’on y trouve un département composite et aérodynamique. Les constructeurs, équipes, ingénieurs et pilotes peuvent s’appuyer sur l’expérience de AOTech pour mener à bien leurs projets les plus ambitieux. La partie aérodynamique est en pointe sur les connaissances aérodynamiques de façon transversale, aussi bien sur les calculs numériques qu’aux essais en soufflerie et sur piste. Le local composite dispose d’une cellule de prototypage rapide et de fabrication de petites séries de pièces composites complexes, de maquettes de soufflerie. AOTech ne travaille pas seulement pour le sport automobile même si ART Grand Prix, OAK Racing ou Citroën Sport font partie des clients.
En arrivant dans la pièce réservée au simulateur, on entend bien le bruit d’une monoplace même si ce n’est que du virtuel. Deux jeunes pilotes de l’Autosport Academy sont en plein « roulage ». Pendant que l’un est en plein debriefing avec un ingénieur, l’autre lime le bitume sur la piste de Magny-Cours. Une batterie d’ordinateurs analysent les datas. Waouh, on est loin de Gran Turismo ! Le fameux simulateur est derrière une glace et le pilote roule dans le noir le plus complet avec 5 écrans de 42 pouces en guise de circuit. En entrant dans la pièce on a l’impression d’être dans Alien avec six gros vérins électriques et six moteurs. On dirait une grosse pieuvre. La coque est celle d’une F3 badgée Dallara. Guillaume Le Goff (Simulation et Simulator Manager) nous fait le tour du propriétaire avec Georges Kaczka et Antoine Leclerc. Il nous fallait bien la présence d’un pilote pour chapeauter le tout. On remarque au sol un disque de freins bien réel. Est-ce un simulateur ou une vraie voiture de course ? Disons que c’est une voiture de course virtuelle qui vous permet de faire un pas dans la réalité de la compétition automobile.
Le pilote peut choisir parmi 30 circuits. Tous ceux empruntés par le GP2, FIA WEC, ELMS ou Blancpain Endurance Series sont au menu. Vous pouvez piloter une McLaren MP4-12C mais aussi une LMP1, LMP2, GP2, GP3, Formule Renault ou F4. Guillaume Moreau et Bertrand Baguette ont notamment participé au développement du simulateur. Il a fallu plus de deux ans pour tout mettre sur pied. Il est possible de rouler avec le plein de carburant, de simuler la dégradation des pneus, de rouler sur un relais complet, d’avoir le dialogue radio avec l’ingénieur. Certains pilotes préfèrent même rouler avec leur casque. Un vrai laboratoire !
Je profite de la présence d’Antoine Leclerc pour choisir la McLaren MP4-12C sur le tracé de Spa-Francorchamps. On a droit à deux pédales, c’est-à-dire qu’il va falloir freiner du pied gauche. Not easy ! Il faut déjà arriver à se hisser dans la Dallara (ndlr : la plaque dans le cockpit le confirme). Une fois harnaché, il faut les dernières explications de Guillaume et Antoine avant de partir en piste. On m’explique même le principe du démarrage pour démarrer la McLaren. Je sens l’air des ventilateurs sous le cockpit et tout le monde quitte la salle. Je reste seul dans le noir dans ma Dallara. On m’a bien fait comprendre qu’en cas de problème, il faut tout arrêter et lever la main. Mais que cache de si particulier ce simulateur…
Les écrans s’allument et la McLaren est posée devant les stands de Spa. Une fois parti, il faut déjà négocier le virage de La Source avant d’enquiller le Raidillon tout en vérifiant les diodes sur le volant, le passage des vitesses se faisant par palettes au volant. Miracle, pas de sortie de piste et la McLaren MP4-12C file à vive allure vers les Combes. Les panneaux indiquant l’arrivée du virage permet de prendre des repères et de descendre les vitesses une à une. Tout ne se passe pas trop mal même si je ne suis certainement pas en Superpole en arrivant à Pouhon, et Fagnes arrive à grandes enjambées. Je place la McLaren sur la partie gauche de la piste pour entrer dans le droit mais deux roues flirtent avec le vibreur. Je me dis que ça va se rattraper tout seul mais il n’en est rien puisque ma monture finit sa course violemment dans le mur. Je sens bien la décélération au niveau du harnais qui me serre fortement le thorax. Là je pense que j’ai donné du travail à l’équipe ART Grand Prix pour deux jours mais le « pilote » va bien. Le temps de faire un reset et je repars pour un autre tour. Selon mon pilote instructeur, le Raidillon se passe en 5, sauf qu’avec moi c’est en 4 sous peine de terminer sous la pile de pneus. Le deuxième tour se passe mieux mais il faut bien sentir le freinage pied gauche, ce qui n’est pas instinctif pour un pseudo pilote de ma trempe. A l’école de pilotage, on parle de freinage dégressif. On passera sur le fait que j’ai légèrement (voire un peu plus) frotté la McLaren contre un rail en entrant dans Pouhon.
Je n’ai malheureusement pas pu boucler un relais complet, le mal de dos commençant à se faire sentir. Rien à voir avec l’installation mais juste une douleur persistante depuis quelques semaines (merci l’avion). Dommage car il était possible de tester la version en mouvement. Je parviens à m’extirper tant bien que mal de l’habitacle pour laisser ma place à de vrais pilotes. Chez AOTech, pas de tableau pour mettre les meilleurs chronos. On ne se bat pas pour faire un temps mais bien pour s’améliorer et progresser. Malgré la jeunesse des deux pilotes présents, aucun n’a parlé de chronos mais plutôt de trajectoires.
Vous l’aurez compris, AOTech Simulator est loin d’être un objet ludique. Il s’adresse à de vrais pilotes et non pas à des gamers. AOTech Simulator est un outil de travail. On ne prend pas un ticket en attendant son tour. Je vais remettre mon dos d’aplomb car il faut voir si la McLaren passe bien en 5 dans le Raidillon…
Merci à Sandrine, Fred, Georges, Guillaume et Antoine pour leur accueil (ndlr : merci aussi de ne pas m’envoyer la note de la franchise d’assurance pour la casse).