Blancpain GT Series

Harold Primat prêt à tirer sa révérence au Nürburgring

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Le rideau tombera sur la belle carrière d’Harold Primat ce week-end (18-20 septembre) au Nürburgring après que le pilote suisse a décidé de prendre sa retraite sportive à l’issue de la manche finale 2015 des Blancpain Endurance Series.

Avant de quitter l’univers des circuits, Primat montera une dernière fois à bord de la Continental GT3 n°84 du Bentley Team HTP à l’occasion de l’étape allemande du plus prestigieux championnat GT européen. 

Âgé de 40 ans, Harold estime qu’il est temps d’ouvrir un nouveau chapitre dans sa vie et souhaite se consacrer à d’autres projets. Mais avant d’enfiler le casque pour un ultime tour de piste, le champion suisse voulait évoquer par le menu son parcours pour le moins singulier, ses débuts relativement tardifs en monoplaces, sa progression en Sport-Prototypes avec à la clé un rôle de pilote officiel LMP1 chez Aston Martin, et enfin ses trois dernières saisons en GT.

Voici donc la carrière d’Harold Primat, vue par le principal intéressé. 

 

LES DÉBUTS

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Le sport automobile a beaucoup changé depuis mes débuts en 1999. Aujourd’hui, on roule en Formule Un à 17 ans et de plus en plus de jeunes pilotes embrassent une carrière professionnelle en voitures de tourisme, GT, ou prototypes à peine sortis des formules de promotion. Mon itinéraire fut très différent : je n’ai pas couru en monoplaces avant mes 23 ans et une expérience en Formule Ford aux États-Unis. J’avais certes été finaliste de la célèbre école Winfield en France mais c’est véritablement outre-Atlantique qu’a commencé ma formation. J’ai ensuite évolué pendant deux saisons dans la catégorie « Scholarship » du championnat de Formule 3 britannique, ce qui représentait déjà un pallier important. J’ai signé quelques belles performances même si je manquais clairement d’expérience par rapport à ceux qui avaient usé leur fond de combinaison en karting dès leur plus tendre enfance !

Je suis tout de même passé en F3 Euro Series à l’aube de la saison 2003. La marche à franchir était de nouveau élevée et je me suis retrouvé à côtoyer des pilotes du calibre de Nico Rosberg et Robert Kubica. Je crois savoir qu’ils ne s’en sont pas trop mal tirés par la suite ! Une fois de plus, mes débuts tardifs ont eu une influence sur mes résultats, mais je n’étais pas prêt pour autant à tirer un trait sur la monoplace. En 2004, j’ai donc rejoint les World Series by Nissan : une initiative heureuse puisqu’elle m’a permis de rencontrer un homme qui allait grandement contribuer à l’évolution de ma carrière. 

PASSAGE EN SPORT-PROTOTYPES

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Au fil de la saison, il est apparu évident que changer de catégorie ouvrirait de nouvelles perspectives. À l’époque, il était très rare de voir des jeunes pilotes passer en Sport-Prototypes pour y faire carrière. Aujourd’hui, c’est devenu monnaie courante. 

En parallèle de mon programme principal en World Series, je suis passé tout près de remporter le championnat d’Endurance V de V en France. Fort de cette expérience, je me sentais de plus en plus capable d’évoluer dans la catégorie reine du LMP1. Alors quand l’occasion s’est présentée de piloter la Dallara-Nissan de l’écurie Rollcentre Racing, j’ai immédiatement sauté dessus. Ensemble, nous avons disputé la majorité des Le Mans Series et j’ai pu participer à mes toutes premières 24 Heures du Mans. J’ai également eu la possibilité de m’aligner en American Le Mans Series en début de saison au volant de la Courage C65-Judd du Kruse Motorsport. Si ces premiers pas se sont soldés par des résultats mitigés, ils n’ont pourtant fait que renforcer mon amour naissant pour l’Endurance. C’est à cette époque qu’avec Serge Saulnier nous avons évoqué un projet commun.

LE TOURNANT

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Nous avions déjà collaboré ensemble puisque j’étais son pilote en World Series by Nissan et Formule 3 européenne. De nos échanges et discussions communes avec un ami journaliste suisse est né l’idée de créer une équipe 100% helvétique. C’est ainsi que Swiss Spirit a vu le jour. Serge connaissait également Marcel Fässler, qui avait joué le titre en DTM avec Mercedes avant de passer chez Opel en 2004. Mais les choses ne s’étaient pas déroulées comme prévu avec la Vectra, et il voulait maintenant démontrer sa valeur en prototypes. 

La campagne 2006 des European Le Mans Series reste l’un de mes meilleurs souvenirs en sport automobile. La Courage LC70-Judd alignée en LMP1 était certes une bonne voiture, mais nous n’avions en théorie aucune chance de lutter avec des structures plus huppées comme celle d’Henri Pescarolo. Je revois encore Marcel décrochant la pole position pour notre toute première course en Turquie. Nous y avons ajouté plusieurs podiums pour finalement terminer quatrièmes au classement général. 

2006 fut véritablement une saison charnière pour les participants de l’aventure Swiss Spirit. Dans la foulée, Serge a été sollicité par Peugeot Sport afin de chaperonner leur toute nouvelle écurie LMP1 ; Marcel a posé les jalons de sa brillante carrière en Sport-Prototypes ; quant à moi, j’ai rejoint l’écurie officielle Pescarolo. Je suis certain que tout le monde conserve d’excellents souvenirs de cette année pas comme les autres. 

PESCA, LE MANS, ET LE DÉFI ASTON MARTIN

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J’ai passé deux super saisons avec Pescarolo, à l’époque où ils étaient au zénith de leur forme. Le châssis 01 et le V10 Judd formaient un attelage très performant, et travailler avec Henri était naturellement un immense privilège. Si 2007 avait offert quelques bons moments, je garde surtout en mémoire notre performance aux 24 Heures du Mans l’année suivante, où nous avons terminé premiers des prototypes à essence et septièmes du classement général. Un résultat qui avait une vraie saveur de victoire tant il était impossible de concurrencer les Audi et Peugeot à motorisation diesel. 

J’étais vraiment heureux chez Pesca, mais en 2009 j’ai eu la chance de rejoindre la nouvelle équipe LMP1 d’usine mise en place par Aston Martin. Une fois de plus, ce fut un grand honneur de défendre les couleurs d’un constructeur aussi renommé. La Lola-Aston est également la meilleure voiture que j’ai eu l’occasion de piloter durant ma carrière. Sa ligne était superbe, sa livrée « Gulf Oil » emblématique, et le bruit de son moteur V12 extraordinaire. Il n’y avait rien de comparable à l’époque. Et c’est d’ailleurs toujours le cas.  

Gagner avec Stefan Mücke à Okayama en Asian Le Mans Series reste l’un des hauts faits de notre première saison. En revanche, les 24 Heures du Mans se sont révélées plus compliquées. Suite à la disqualification sévère de notre équipier Stuart Hall, Peter Kox et moi avons dû couvrir la quasi-totalité de l’épreuve à deux. Nous nous en sortions plutôt bien lorsqu’une fuite d’eau m’a envoyé dans le mur de pneus au niveau des virages Porsche. Après avoir fourni tant d’efforts, le coup fut dur à encaisser. 

Nous avons signé quelques bons résultats la saison suivante – notamment une belle troisième place à Sebring – mais c’est véritablement à compter de 2011 que nous sommes parvenus à tirer la quintessence de notre voiture. L’année fut pourtant marquée par les débuts contrariés de notre AMR-One, dont le moteur 2 L à six cylindres en ligne turbocompressé nous donnait du fil à retordre. Après une prestation sans saveur au Mans, nous avons décidé de revenir à notre ancien modèle. Bien nous en pris car Adrian Fernandez, Mücke, et moi nous sommes imposés à Laguna Seca avant de finir troisièmes de la célèbre épreuve de Petit Le Mans. 

Aston a ensuite abandonné son programme LMP1 au profit de son implication sur la scène GT. De mon côté, j’avais toujours envie de courir en prototypes et j’ai finalement rejoint les rangs du Rebellion Racing pour participer à la saison inaugurale du championnat du monde d’Endurance FIA. Comme avec Pescarolo quelques années plus tôt, nous ne pouvions pas rivaliser avec les structures d’usine mais j’ai quand même pris beaucoup de plaisir à bord du coupé Lola. D’autant que nous avons remporté plusieurs courses pour soulever le Trophée Endurance FIA des écuries privées LMP1 en fin d’année. 

L’APPEL DU GT

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Au fil de la saison 2012, je me suis rendu compte qu’il était impossible de jouer la gagne en LMP1, à moins de courir au sein d’une structure d’usine officielle. Partant de ce constat, je suis alors passé aux voitures de Grand Tourisme. Je n’en avais jamais piloté en compétition avant de rejoindre l’écurie Phoenix et il m’a fallu un petit temps d’adaptation. Les prototypes sont beaucoup plus légers et disposent d’un fort appui aérodynamique. Pousser une GT dans ses derniers retranchements ne s’improvise pas et nécessite de l’entraînement. 

Pour être honnête, la Balance de Performance du Blancpain 2013 nous a empêchés d’extraire le plein potentiel de l’Audi R8 LMS, hormis lors des 24 Heures de Spa-Francorchamps où nous avons fini quatrièmes au général. Les courses longues restaient mon terrain de prédilection ; je garde d’ailleurs un excellent souvenir de mes premières 12 Heures de Bathurst, également conclues à la quatrième place. L’événement a le vent en poupe depuis plusieurs saisons et je m’y suis toujours régalé. 

L’épreuve australienne figurait d’ailleurs parmi mes priorités à l’abord de la saison 2014. De retour sur le Circuit de Mont Panorama avec HTP Mercedes, j’ai de nouveau vécu une course épique, jalonnée de souvenirs marquants et ponctuée par un duel pour la victoire incroyablement serré. Certes, nous avons fini deuxièmes, mais à moins d’une demi-seconde des vainqueurs ! Cette saison-là, je fus également très heureux de rallier l’arrivée de mes premières 24 Heures du Nürburgring en septième position, ainsi que de jouer le titre en Blancpain jusqu’à la dernière épreuve.  

Pour l’une ou l’autre raison, ce joli scénario ne s’est pas répété en 2015 mais je reste particulièrement fier d’avoir contribué à écrire l’histoire de Bentley sur la Nordschleife. En se classant huitième dans le massif de l’Eifel, notre Continental GT3 était la première voiture non-allemande à l’arrivée, tout en devançant les deux représentantes Bentley officielles. Réitérer pareille performance aux 24 Heures de Spa en terminant cinquièmes de la catégorie Pro Cup fut tout aussi remarquable. Ces deux résultats représentent beaucoup à mes yeux !

 UN TRAVAIL D’ÉQUIPE AVANT TOUT

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Tout au long de ma carrière, j’ai eu la chance d’avoir de formidables compagnons de route.
En matière de talent pur, Marcel figure naturellement en bonne position, tout comme Mücke. Et quel privilège de faire équipe avec Bernd Schneider chez HTP la saison dernière : il a toujours une sacrée pointe de vitesse ! J’ai également eu le plaisir de courir avec Benoît Tréluyer au Mans en 2007, tandis que Maxi Buhk était constamment véloce dans la Mercedes. 

Sur un plan peut-être plus personnel, plusieurs autres pilotes me viennent à l’esprit. Je citerai tout d’abord Christophe Tinseau, avec qui j’ai passé deux saisons chez Pescarolo, en 2007 et 2008. Nous nous entraidions constamment et notre entente était tout bonnement excellente. Christophe connaissait la voiture comme sa poche. 

Je suis également devenu très proche d’Andrea Belicchi chez Rebellion Racing. Il n’y avait aucune trace d’ego entre nous, juste un formidable travail d’équipe. 

Vient ensuite Adrian Fernandez. Nous étions ensemble chez Aston Martin en 2010 et 2011, et honnêtement, je n’aurais pu rêver meilleur équipier. Il était non seulement très rapide, mais aussi totalement transparent au moment d’en détailler les raisons. Jamais il ne m’a caché d’informations et nous avons développé des liens très étroits, sur le plan professionnel comme personnel. Je serai éternellement reconnaissant envers Adrian pour les choses qu’il m’a enseignées durant ces deux campagnes où nous avons partagé plusieurs résultats mémorables. 

J’aimerais également mentionner le nom de Christopher Brück. S’il est moins connu, Christopher n’en reste pas moins un incroyable spécialiste de la Nordschleife, où il court régulièrement dans le cadre du championnat VLN. Nous avons fait équipe lors des dernières 24 Heures du Nürburgring, et nous sommes immédiatement très bien entendus.

PRINCIPAUX FAITS MARQUANTS

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J’en ai déjà évoqué plusieurs. Terminer septièmes au Mans en 2008 reste assurément l’un des meilleurs moments de ma carrière. Passer tout près de la victoire à Bathurst l’an passé également. Je garde aussi d’excellents souvenirs de mes belles performances aux 24 Heures de Spa et du Nürburgring, tandis que mon podium à Sebring est tout aussi inoubliable. 

Pourtant, si je ne devais en retenir qu’un, je choisirais ma victoire à Laguna Seca avec Adrian et Stefan Mücke en 2011. Aston Martin sortait d’une période très frustrante avec l’AMR-One, et nous n’étions pas très compétitifs avec notre ancien modèle. Néanmoins, après nous être familiarisés avec le nouveau règlement sur plusieurs courses, je me souviens que nous étions totalement dans le coup en Californie. C’était sans doute la première fois en trois ans que je ne faisais qu’un avec la voiture et le moteur. Ce jour-là, toutes les pièces se sont mises en place pour Adrian, Stefan et moi, et nous avons vécu une expérience absolument fantastique !

L’AVENIR

Après 17 ans de compétition automobile, l’heure est venue de tourner la page. J’ai eu une superbe carrière mais je souhaite maintenant me consacrer à d’autres projets en ouvrant un nouveau chapitre. Bien sûr, des opportunités ponctuelles se présenteront sûrement, mais, si je ne peux pas m’impliquer à 100%, j’estime que cela n’en vaut pas la peine. Ni pour moi, ni pour l’écurie et mes équipiers. 

Ma compagne Cassie attend également notre premier enfant, et j’imagine que cet heureux événement a inconsciemment joué un rôle dans ma décision. J’ai déjà plusieurs initiatives de prévues, qui devraient je l’espère m’aider à garder un pied dans l’univers de la course automobile. Cela dit, j’ai encore du temps avant de m’y atteler pleinement. 

Pour le moment, je vais juste profiter de ce dernier week-end de course avec le Bentley Team HTP. Il est certain que la camaraderie qui règne dans le paddock et le garage va me manquer, tout comme la montée d’adrénaline en piste. C’est pourquoi j’espère vraiment que nous pourrons célébrer un bon résultat dimanche soir. Et conclure ainsi l’histoire en beauté. 

Harold

 

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