Voici la suite de la saga débutée hier sur les aventures Courage Compétition en 1995 et Pescarolo Sport 2005. Après la présentation des forces en présence, il est grand temps de revivre les courses…
C’est à 16 Heures qu’est donné le départ des 24 Heures 1995. Les deux WR conservent leur position des essais devant la Courage n°13 jusqu’aux Hunaudières ou Bob Wollek passe William David aux prises avec un saute-vent récalcitrant. La Courage n°11 de Henri ne peut suivre ce trio et se contente de se battre avec la meilleure des McLaren, celle de John Nielsen. Comme prévu, elle ne sera pas vraiment d’une grande aide à Courage Compétition. Après 2 heures de course, Franck Lagorce s’immobilise à Arnage. Son désespoir de voir sa C41 ainsi immobilisée l’incite à la pousser pour tenter de lui redonner vie ce qui est formellement interdit par le règlement mais cela reste une image forte. La batterie étant à plat, la 11 ne rejoindra jamais son stand. Les WR connaissant leur part de problème dont le très gros accident de Patrick Gonin dans les Hunaudières, la Ferrari 333 SP n’ayant tenu qu’une demie-heure, les Kremer K8 s’avérant très difficile à piloter dans les conditions spéciales de ces 24 Heures 1995, la Courage n°13 demeure donc très vite le seul atout des prototypes dans la quête de la victoire face aux GT !
Des conditions spéciales ? Oui car dès la fin de la première heure, la pluie s’invite sur le circuit. On peut même dire qu’elle noie assez vite la piste rendant ces 24 Heures très difficiles. Mais l’autre conséquence de cette fraîche humidité, c’est que les GT s’avèrent aussi à l’aise que les protos, leur poids supérieur devenant un avantage en terme de motricité, leurs pneus moins larges leur évitant des risques d’aquaplanning… Les chronos sont désormais quasi identiques et la C34 lutte à armes égales mais en sous-nombre. C’est en ces moments que Yves Courage aurait apprécié disposer d’une seconde C34… Car le nombre des McLaren fait leur force. Elles accaparent la tête du classement à tour de rôle. Les deux F1 GTR de David Price figurant le plus souvent à la première place.
Soudain, peu avant 20 heures, les caméras de télé se tournent vers la nouvelle portion. La Courage n°13 est en marche arrière, l’aileron étant arrachée. Mario vient de taper le mur de l’arrière. Il a été surpris par la faible vitesse de la plus lente des deux Kremer. Il a du freiner fort en appuis sur le mouillé, perdant instantanément la voiture. Il peut la ramener aux stands assez vite mais il faut changer la transmission ARD ce qui prend une trentaine de minutes. La n°13 se retrouve à 6 tours de la tête, une longue remontée s’impose… Les averses continuent de noyer régulièrement la piste au cours de la nuit, celle-ci ne séchant jamais vraiment. Les McLaren perdent des atouts au gré des aléas de la course, sortie de piste des deux Gulf (définitive pour la n°25 alors en tête) et embrayage HS pour la West, mais à mi-course, les deux F1 GTR n°51 et n°59, assez discrète jusque là pour la seconde, pointent au commandement. La Courage n’a pas souffert de sa sortie de piste de la veille. Elle est revenue à la troisième place mais demeure à 4 tours de la F1 GTR jaune et verte. Il reste beaucoup de chemin à faire…
Pour la dernière fois depuis lors, le départ des 24 Heures 2005 est donné à 16H. Cela ne s’est plus jamais produit depuis. Il fait beau, très beau, la pluie des essais du mercredi est oubliée, les deux C60 hybride peuvent donc prendre la poudre d’escampette. Devant une foule toute acquise à leur cause, Boullion et Ayari s’échappent implacablement. Les Audi se retrouvent à plus d’une minute après une heure de course, c’est donc au rythme de 5 secondes au tour que les C60 bâtissent leur avance. L’euphorie ne va malheureusement pas durer. Peu avant la fin de son double relais, les trajectoires de Patrick Bourdais et Soheil Ayari se croisent à l’entrée d’Arnage. Le choc n’est pas violent mais nécessite un arrêt aux stands pour changer la biellette de direction gauche. En 5 minutes, l’affaire est bouclée mais voilà la 17 déjà lancée dans une remontée prématurée.
Tout cela ne serait pas bien grave si moins d’une heure plus tard, Erik Comas ne ramenait à son stand la n°16. Les rapports passent mal. On ausculte la boite et 7 minutes plus tard, la n°16 ressort de son stand. Mais Erik ne fait qu’un tour avant de rentrer à nouveau. Le problème reste présent ! On opère alors la boite à carter ouvert. Il faut changer le barillet de la crémaillère. Et la C60 n’est pas une Audi R8, Pescarolo Sport n’a pas un train arrière complet au fond du stand interchangeable en 3 minutes. Il faut du temps pour réaliser cette opération, 27 minutes exactement ! Seul « coup de bol » dans ce malheur, la quasi intégralité de l’intervention s’effectue durant une neutralisation de la course, limitant au mieux le retard pris sur les Audi. Plus de 6 tours, c’est ce qu’il va falloir désormais aller chercher « à la cravache »…
Certes, de petits malheurs commencent à affecter également les Audi mais les « verts » n’en ont pas fini avec les leurs. C’est alors au tour d’Eric Hélary d’être fortement ralenti par une crevaison. Il ramène au stand une C60 intacte mais la n°17 est désormais à 2 tours de la R8 n°3 après 4 heures de course. Il ne suffit pas d’être rapide, il faut aussi que Dame Fiabilité et Dame Chance restent bien tranquilles… Il n’en est rien. Peu avant minuit, Bruno Vandestick signale un accrochage dans les Hunaudières à la première chicane. La Dallara n°8 a percuté la Pescarolo n°17 à l’arrière. Il faut, pour la troisième fois, rentrer une C60 dans le box. Fond plat, aileron, suspension, l’intervention est lourde. 23 minutes sont perdues. Le challenge semble être de plus en plus ardu et la n°16 redevient le meilleur atout d’Henri. D’autant qu’une heure plus tard, Collard, Boullion et Comas sont revenus à 4 tours de l’Audi Champion n°3 tandis que Ayari, Loeb et Hélary sont à 10 tours…
Lorsque le jour se lève en ce dimanche 18 juin 1995, le ciel est toujours couvert, la piste toujours humide et la Courage a grignoté une boucle de plus. Plus que trois… Tandis que les deux McLaren commence à se chiffonner, roues dans roues, pour la tête de l’épreuve, Mario Andretti contrôle superbement sa Courage, les quatre roues dans l’herbe à la sortie des Esses du Tertre Rouge ! Il ramène donc à 9H39 une Courage intacte dans son stand. Le ravitaillement s’opère normalement. Bob Wollek relaie l’américain mais il ne repart pas immédiatement. Les mécanos s’affairent subitement à changer un capot arrière qui ne montre aucune trace de choc. Pourquoi donc ? L’affaire ne serait pas si grave si le changement s’opérait sans problème. Oui mais… Oui mais la n°13 a tapé la veille au soir. Tapé à l’arrière. Et le châssis est légèrement faussé. Le nouveau capot, propre comme un sou neuf, refuse de se mettre en place ! Il faut ramener la n°13 dans le box pour opérer. Elle en ressort après plus de 4 minutes. Le nouveau capot est en place mais un nouveau tour est perdu… 4 boucles à reprendre, 6 heures de course et quoi d’autre ? Et une piste qui va enfin s’assécher ! Il ne pleut plus…
Wollek, Andretti et Hélary peuvent enfin lâcher les chevaux. A coup d’une dizaine de secondes au tour, remonter sur les McLaren semble toujours possible. Pour la n°51, cela s’avère même un peu plus facile. La boite, l’embrayage et les freins fatiguent et la famille Bell accompagnée de Wallace abdiquera tout d’abord face à la F1 GTR noire et grise à 2 heures du but puis face à la Courage dans la dernière heure. Reste donc un duel entre la McLaren n°59 et la Courage n°13. A 12H46, un changement d’aileron sur la Kokusai prend 3 minutes. La Courage en profite-t-elle ? Non, même pas ! Car exactement au même instant, Eric Hélary subit une crevaison. Match nul ! Impensable, le sort semble vraiment s’acharner sur le clan Courage et enrayer toutes ses tentatives. Malgré tout, le suspense reste fort. La remontée est longue, très longue mais une petite lueur demeure au fond du tunnel. A 13H, l’écart n’est plus que de deux tours et il reste trois heures de course !
Lehto, Dalmas et Sekiya vendent très chèrement leur peau mais la Courage poursuit sa remontée. L’espoir s’amenuise petit à petit toutefois… Certes, à ¾ d’heure de l’arrivée, la ligne droite des stands s’embrase lorsque Bob se dédouble sur Yannick juste devant les gradins. La 13 est deuxième et dans le tour de la voiture de tête ! Peu de temps après, la McLaren et la Courage ravitaillent. 38 secondes pour les deux équipes, match nul une nouvelle fois ! Bob repart à l’assaut. Mais il n’y croit plus vraiment. Il reprend cependant encore 45 secondes ramenant la n°13 à trois minutes de la n°59 lorsque Marcel Martin abat le drapeau à damiers. Mais c’est le capot de la McLaren qu’il salue… Trois minutes d’écart. Un changement de capot en trop…
La suite de la nuit des 24 Heures 2005 est plus clémente avec Pescarolo Sport. La n°16 profite des heures obscures pour reprendre un nouveau tour. A 6 heures, il ne reste plus que 10 minutes à reprendre. Plus que… Tandis que la n°17 semble être de plus en plus difficile à contrôler, les tout droits sans conséquence se multipliant, la n°16 remonte, remonte. Lentement, lentement. D’autant plus lentement que la piste désormais bien gommée permet aux Audi de rouler plus fort que la veille. Et si à 7 heures du matin, la n°16 s’est de nouveau installée à la deuxième place, l’Audi de tête aux mains de Kristensen, est passée sous la barre des 3’40″ au tour. La lutte est intense et le clan Champion Racing pousse. Un peu trop de temps en temps. Tom tire au large dans le ralentisseur Michelin peu après 8 heures mais sans dommage. Conséquence indirecte, au classement horaire suivant, la C60 n’est plus qu’à deux tours ! Il reste un quart de l’épreuve à couvrir et 7 minutes à remonter. Possible ? Peut-être, oui, car à midi, la C60 est revenue à un tour ! 4’40″ pour être précis restent à reprendre à l’Audi. 60 minutes plus tard, la C60 est à 3’50″ soit à peine plus d’un tour ! Manu Collard peut presque commencer à apercevoir les feux arrière de l’Audi au loin… Les espoirs sont toujours forts. Du moins dans les tribunes…
Car chez Pescarolo Sport, on sait que cela commence à se compliquer sérieusement. Le soleil est toujours présent en ce dimanche matin et bien présent. Les températures montent en flèche et celles du Judd commencent à en faire de même. Une remise à niveau du liquide de refroidissement s’est avérée nécessaire peu avant midi. Mais la tendance reste à la hausse. Le forcing se poursuit mais l’inquiétude naît quant à la tenue du V10. Un nettoyage des radiateurs trahit le problème mais le mal est toujours là. A deux heures de l’arrivée, décision est prise de garder le Judd en vie et d’amener la C60 à l’arrivée. Pour cela, il faut se contenter de la deuxième place. Le rêve est passé. Collard, Comas et Boullion lèvent le pied et l’écart remonte. La R8 rejoint la C60, les deux voitures ayant le plus animé cette épreuve passent la ligne d’arrivée ensemble. Joli symbole. L’écart final est de deux tours, soit 7 minutes. A peu de chose près, la durée du premier arrêt pour le problème de boite, celui qui n’avait pas résolu le souci… Pescarolo Sport est battu. Tout comme Courage Compétition dis ans plus tôt…
Nous avons demandé à Yves et Henri de nous donner leurs sentiments sur ces deux éditions à la fois brillantes et malheureuses pour eux. Vous pourrez découvrir cela dès demain…