Depuis les 24 Heures du Mans, G-Drive Racing a couru derrière SMP Racing pour combler son retard au championnat. En arrivant à Sao Paulo pour la finale, c’est pourtant le team dirigé par Philippe Dumas qui arrivait en leader de la catégorie LM P2 face à l’autre team roulant sous bannière russe. Alors que G-Drive devait contrôler, le camp adverse devait pousser. Le duel a vite tourné à l’avantage de la concurrence suite à l’abandon prématuré de la Ligier JS P2. Malgré la défaite, Jacques Nicolet, patron de Onroak Automotive, sait que ses Ligier et Morgan seront attendues la saison prochaine dans les différents championnats. Entre le Tudor United SportsCar Championship et l’Asian Le Mans Series avec OAK Racing, le développement de la Ligier JS P2, les relations avec les clients et la préparation de 2015, Jacques Nicolet a troqué cette année la casquette de pilote pour celle de chef d’une entreprise en plein développement. Bilan de saison et perspectives d’avenir…
Commençons par les Etats-Unis. Avec du recul, l’idée d’aller défier les américains avec une LM P2 était bonne ?
« Nous étions l’unique équipe européenne à nous aligner sur l’intégralité du championnat. OAK Racing est passé tout près de la victoire à Daytona dès l’ouverture. L’équipe a connu des hauts et des bas, mais on ne regrette rien. Dans l’ensemble, la saison a été très bonne et l’accueil parfait. Notre travail a permis de vendre deux Ligier à des teams américains. En 2015, nous soutiendrons nos équipes pour qu’elles réussissent. OAK Racing est allé aux Etats-Unis en étant conscient de la complexité du dossier. Je tiens à remercier l’IMSA car la mise en place du règlement n’a pas été facile pour une seule auto. Ils nous ont permis d’évoluer en cours d’année. A Austin, il y a eu la pole et nous avons bien failli gagner. A Petit Le Mans, nous avions l’auto la plus rapide. Bien sûr, nous aurions peu faire mieux mais cela a permis de nous faire connaître sur un autre marché. Avec Krohn Racing et Michael Shank Racing, nos intérêts seront bien représentés.
« Rouler en Tudor nous a fait franchir une nouvelle étape sur la façon de voir la course. Je suis content d’avoir pris ce risque qui n’était pas gagné d’avance. Pour 2015, il n’est pas prévu de rouler car comme je l’ai dit, on préfère se concentrer sur nos clients. De plus, nous avons des contacts pour voir d’autres autos en cours d’année. »
Malgré le peu de LM P2 présentes en FIA WEC, les courses ont été belles…
« La catégorie LM P2 est comme elle est. Il n’y avait pas la quantité mais la qualité était là. KCMG et SMP Racing nous ont donné du fil à retordre toute l’année. Je suis assez optimiste pour 2015 où on devrait avoir plus d’autos. Sur un plan plus général, le championnat se voit renforcer avec l’arrivée des constructeurs. Tout le monde pensait que Mark Webber allait faire la nique à tout le monde dès ses débuts. Il est bien là mais il lui a fallu du temps pour s’adapter. A contrario, André Lotterer va rouler en Formule 1, et sans connaître l’auto, il était devant son équipier. C’est dire le niveau des courses d’endurance. On parle d’endurance, mais on peut assimiler ça à du sprint, aussi bien sur 6 heures que 24 heures. On ne peut plus rien gérer, il faut attaquer du début à la fin. »
Sur un plan plus global, le bilan de la première année de la Ligier JS P2 est bon ?
« On a montré quelque chose d’important. L’auto a été développée par l’équipe de course et c’était un vrai plus. Cela nous a permis de faire d’entrée une voiture qui termine les 24 Heures du Mans avec deux motorisations différentes et deux manufacturiers de pneumatiques différents. Sur ce plan, c’est un sans-faute. L’installation du HPD a été compliquée mais la Ligier s’est de suite montrée compétitive. On espère la même réussite avec le Judd sur la Ligier du Krohn Racing. Je suis très fier de ce dont on est capable. Pour ce projet, nous sommes partis d’une feuille blanche à 100%. La partie composite est réalisée par le groupe (HP Composites) en Italie. »
Que dire du marché du européen pour la Ligier ?
« On a des pistes très sérieuses pour l’Europe. Cependant, c’est comparable au marché avec les DP actuelles. C’est plus difficile car il faut trouver quoi faire des anciennes autos. Avant Le Mans, si on m’avait dit que j’aurai vendu quatre Ligier au 30 novembre, cela m’aurait permis d’être plus détendu. C’est un très beau résultat dans les circonstances actuelles. N’oublions pas la Morgan qui est encore capable de s’imposer et de faire des podiums. L’auto arrive en fin d’homologation et nous allons proposer quelques évolutions. La Morgan LM P2 reste un très beau produit et il est prévu de voir des Morgan en FIA WEC la saison prochaine. »
La « nouvelle » Morgan prendra quelle appellation ?
« Ce n’est pas déterminé, mais si on suit la logique des Ligier CN, ce pourrait être Morgan LM P2 EVO. »
G-Drive Racing poursuivra le bail en FIA WEC la saison prochaine ?
« On va tout faire pour. L’entente entre les deux parties est parfaite. L’idée est de renouveler la collaboration. Tout est à l’étude. Rien n’est arrêté pour une ou deux autos. La liste des pilotes qui veulent rouler sur une Ligier fait plaisir à voir. Cette année, nous avons franchi une étape dans les rapports avec les différents constructeurs. On fait partie des gens qui savent construire une auto. »
La piste LM P1 est définitivement abandonnée ?
« Pour 2015, la réponse est oui car le timing ne le permet plus. Mais ce n’est pas un secret que je suis quelqu’un qui renonce difficilement. Plus j’avance dans le projet, plus je souhaite le sécuriser au maximum. J’ai l’espoir que le projet puisse aboutir pour 2016. On représente un produit qui a une très forte crédibilité. On a aussi une indépendance qui nous donne une force importante. A titre d’exemple, plus de 500 châssis sont sortis de chez HP Composites depuis fin 2010. L’entreprise emploie 180 personnes. »
Que retenir de l’implication de OAK Racing en Asie ?
« Je reste persuadé qu’une grande partie de l’avenir de l’endurance va se jouer en Asie. Le marché part de zéro. Il faut une implication plus forte et plus directe de l’ACO pour que tout soit fait en accord avec le marché. »
« Le règlement est intéressant mais il va falloir gérer les performances parmi les catégories existantes. Le coût imposé est trop difficile à respecter. La décision d’y aller ou pas n’est pas encore prise. Je pense qu’il n’y a pas besoin d’intégrer les CN en ELMS comme c’est le cas en Asie. J’ai beaucoup milité pour qu’il y ait plusieurs châssis. C’est ça l’Endurance. Il faut juste que le produit soit en phase avec ce que l’on veut. »
Est-il prévu de voir d’autres motorisations en LM P2 ?
« Nous sommes les seuls à avoir construit une auto où dans les six mois de sa sortie, on propose le maximum de choix. Pour l’avenir, rien n’est fermé. »
Jacques Nicolet pilote, c’est terminé ?
« Quand je vois la banane des pilotes qui sortent de la Ligier, cela me rend fou de rage de ne pas en être (rire). Cette année, je me suis concentré à mon rôle de représentant de la partie constructeur, mais l’envie de rouler est toujours bien là. Je ne peux pas dire à ce jour que ma carrière de pilote est terminée. On discute pour 2015. »