La 82ème édition des 24 Heures du Mans terminée, il est temps désormais de commencer notre traditionnel abécédaire de la course 2014, occasion de revenir sur les hommes et les faits marquants de cette édition que l’on pourra ranger sans nul doute parmi les belles éditions.
Cet abécédaire ne prétend pas à être exhaustif, car il est subjectif, aussi il peut contenir des oublis. Nous nous excusons par avance auprès de ceux que nous aurions passés sous silence et qui auraient mérité d’être eux aussi mis en exergue.
Pour commencer ce petit exercice évidemment par la lettre A, commençons tout d’abord – ça devient une habitude !- par déroger à l’ordre alphabétique en commençant par A comme Audi, il serait difficile de ne pas mettre le constructeur en allemand en tête de gondole !
A comme Audi – Veni, Audi, Vici
Cette déformation de la célèbre phrase de Jules César après une victoire peut paraître galvaudée, mais elle résume tout à fait la victoire de marque aux quatre anneaux.
Avec 13 victoires en 16 participations au Mans, Audi maîtrise la classique mancelle sur le bout Depuis 1999, année de la première venue de Audi au Mans avec la R8R, il y a eu sans interruption au moins une Audi sur le podium, si ce n’est deux et même parfois trois. Le ratio parle de lui-même.
Après une première année pour voir en 1999, Audi n’a été vaincu que deux fois, la première par Bentley – mais celle-ci avait une forte connotation Audi, notamment au niveau de la motorisation- et par Peugeot, la victoire de la Peugeot 908 HDi FAP en 2009 constituant le seul véritable revers pour Audi en seize courses. Respect !
Cette victoire de 2014 est d’autant plus belle qu’elle n’était pas évidente. Si Porsche dont les 919 Hybrid débutaient dans la Sarthe et étaient plutôt considérés comme des outsiders avant de devenir une menace sérieuse dans les années à venir, Toyota était un adversaire plus que sérieux et avait les faveurs de bon nombre de pronostiqueurs, faveurs justifiées par les victoires probantes en WEC à Silverstone et à Spa et par les performances des TS040 tant lors de la Journée Test que des qualifications des 24 Heures.
Audi justement était apparu en retrait à Silverstone et à Spa. Si l’échec de Silverstone pouvait être nuancé par les sorties de route des R18 e-tron quattro 2014, la suprématie de Toyota dans les Ardennes avait été claire et pouvait laisser entrevoir des espoirs légitimes au constructeur nippon.
Les choix techniques même de Audi avaient été critiqués. Certains reprochaient à Audi son conservatisme, arguant que la R18 e-tron quattro 2014 n’était en fait qu’une évolution de la voiture 2013, que Audi avait conservé le diesel au lieu de passer à l’essence, que Audi avait fait le choix de la plus petite option de récupération de l’énergie, à savoir l’option 2MJ par crainte de ne pouvoir maîtriser les options 4MJ ou 6MJ, bref que le constructeur allemand allait jouer cette année petit bras…
La réplique de Audi a été cinglante. Maîtriser, c’est que la marque sait faire et particulièrement au Mans où elle est quasiment comme dans son jardin. Tout a été pensé, étudié, fabriqué, testé en fonction des 24 Heures et le team était fin prêt pour les 24 Heures. Les choix techniques et sportifs ont été les bons. En ce qui concerne les choix sportifs : le diesel, Audi connaît désormais parfaitement sa technologie et le choix de l’option 2MJ a certainement été validée non par crainte de ne pouvoir s’adapter aux options supérieures mais parce qu’elle était celle qui convenait le mieux à la motorisation diesel. Quant aux choix sportifs ils ont été au diapason : comme Audi en a l’habitude maintenant, trois voitures ont été engagées, et on peut dire que cette voiture supplémentaire a pesé lourd dans l’issue des 24 Heures 2014, ce qu’a confirmé au micro après la course Jacky Ickx, qui connaît lui aussi Le Mans par cœur. « Pour gagner Le Mans, il faut trois voitures » a déclaré le champion belge. Quand on sait qu’il est un des ambassadeurs de Porsche, le message est peut-être passé…Le choix des pilotes a également été le bon : Audi (comme Toyota d’ailleurs) a conservé ses pilotes. Le trio Treluyer/Lotterer/Fässler, vainqueur en 2011 et en 2012, a été conservé. Pour pallier à l’arrête de la compétition de Allan McNish, Luca Di Grassi a rejoint Loïc Duval et Tom Kristensen. Pour épauler Oliver Jarvis, Marco Bonanomi, le pilote d’essais de la R18 e-tron quattro et qu’on avait vu au Mans en 2013, a été élevé au rang de titulaire sur l’Audi n°3 pour prendre la place laissé vacante par Di Grassi. Le seul nouvel arrivant dans l’équipe LMP est le portugais Filipe Albuquerque, mais il vient du sérail Audi pour avoir couru en DTM ces dernières années. Le seul véritable absent par rapport à 2013 est l’espagnol Marc Gené, mais Audi l’a gardé sous contrat et a bien fait, l’espagnol remplaçant Loïc Duval après l’accident de ce dernier mercredi dernier et effectuant une brillante prestation dans ces 24 Heures 2014.
Ajoutez à tout cela des moyens financiers considérables –mais il faut savoir se donner les moyens de sa politique- et une compétence du personnel à toute épreuve, comme en témoigne la remise en état pour la journée de jeudi de l’Audi n°1 après le crash de Loïc Duval la veille, et tout était mis en place pour un bon résultat, et plus si affinités….
En résumé, cette victoire tient de tout, sauf du hasard, et il faudra encore compter avec Audi en 2014, même si la concurrence sera encore plus rude, tant l’expérience de Audi est inégalable.
Gary Lineker avait coutume de dire « Le football se joue à onze, et à la fin c’est toujours l’Allemagne qui gagne… », on pourrait dire actuellement « Le Mans, ça se joue à 55 (ou à 56 ou à 54 comme cette année, et à la fin, c’est toujours Audi qui gagne… ». Aux autres constructeurs de démentir cette assertion en 2015 !!
A comme Abandons
54 voitures étaient au départ, et 15) ont abandonné. Ce sont : en LMP1-H l’Audi n°3 (accident) et la Toyota n°7 (incendie) en LMP1-H, en LMP1-L la Rebellion n°13 (moteur), en LMP2 l’Oreca-Nissan O3R SMP Racing n°37 (fuite d’huile), la Zytek Z11SN Nissan Greaves Motorsport n°41 (accident), l’ORECA-Nissan 03R KCMG n°47 (accident), l’Oreca-Nissan 03R Murphy Prototypes n°48 (sortie de piste)et la Morgan-Nissan G-Drive Racing n°26 (sortie de piste), en GTE Pro la Ferrari 458 Italia AF Corse n°71 (moteur) et la Ferrari 458 Italia RAM Racing n°52 (boîte de vitesses), en GTE Am, la Ferrari 458 Italia AF Corse n°81 (accident), la Ferrari 458 Italia n°60 AF Corse (sortie de piste), la Ferrari 458 SMP Racing n°72 (sortie de piste) et la Porsche 911 GT3 RSR n°75 (perte d’une roue) et pour le 56ème stand (CDNT), la Nissan ZEOD RC (boîte de vitesses). A noter qu’en LMP2, catégorie naguère jugée la plus fragile, un seul abandon sur panne mécanique est enregistré alors qu’il y avait dix-sept voitures au départ.
A comme Accidents
Si heureusement cette année ils n’ont pas eu un caractère aussi dramatique que celui qui coûta la vie au regretté Allan Simonsen l’année dernière, plusieurs crashes nous ont fait néanmoins passer des frissons cette année : celui de Loïc Duval (Audi n°1) lors des essais libres de mercredi, ceux de James Calado (Ferrari AF Corse n°71), de Fernando Rees (Aston Martin AMR n°99), de Léo Roussel (Morgan Nissan Pegasus Racing n°99) et de Bret Curtis en qualifications, ceux de Marco Bonanomi (Audi n°3), de Nicolas Lapierre (Toyota n°8) et de Sam Bird (Ferrari AF Corse n°81) en course…Plusieurs de pilotes en ont été meurtris dans leur chair, mais nous en reparlerons.
A comme AF Corse
On aurait pu dire également A comme Armada si le team n’était italien…Enorme effort cette année au Mans de l’équipe de Amato Ferrari avec pas moins de six voitures engagées en LM GTE (deux en GTE-Pro, quatre en GTE-Am) plus le support technique assuré à la 458 du 8Star Motorsports engagée en GTE-Am.
Cet effort a été récompensé par une magnifique victoire en GTE-Pro de la Ferrari n°51 de Fisichella/Bruni/Vilander après une bagarre qui a duré pratiquement durant l’intégralité de la course. Malgré les quatre voitures inscrites en GTE-Am, AF Corse doit se contenter de la troisième place de l’équipage Cioci/Venturi/AF Corse, avec cependant donc une place sur le podium, mais au total la prestation de l’équipe italienne a été remarquable et sa présence, notamment dans le paddock, imposante.
A comme Affluence
L’ACO a recensé 263 300 spectateurs pendant la semaine de la course, la fréquentation la plus forte de ces dernières années. Plusieurs explications ont été mises en avant pour expliquer cette augmentation de la fréquentation de l’épreuve : la météo, le retour de Porsche avec de surcroît Mark Webber, la participation à la course de Patrick Dempsey, Fabien Barthez et David Hallyday… Et si tout simplement les spectateurs aimaient l’endurance et plus particulièrement les 24 Heures ?
A comme Arrivée
L’Automobile Club de l’Ouest a renoué avec une tradition heureuse qui a contenté tout le monde, pilotes ou spectateurs, en laissant accomplir un tour d’honneur aux voitures ayant franchi la ligne d’arrivée, ce qui permettait aux spectateurs le long du parcours de pouvoir saluer comme ils le méritent les concurrents. Ce spectacle a donné lieu à de belles images, avec par exemple la Porsche n°14 de Marc Lieb, qui avait repris la piste quelques instants plus tôt, se plaçant dans le sillage immédiat des deux Audi comme pour mieux leur rendre hommage et leur donner rendez-vous à l’année prochaine….
A suivre…