Les récentes défections de la liste des équipes sélectionnées pour les 24 Heures du Mans rappellent si besoin en était que faire rouler une voiture de course coûte de l’argent, beaucoup d’argent. On ne peut pas dire que les euros ou dollars coulent à flot dans une conjoncture économique encore difficile. Il ne faut pas se leurrer, on ne s’enrichit pas à faire du sport automobile. On gagne juste de l’image et un transfert de la piste à la route pour les constructeurs. Quand l’équipe qui remportera la Coupe du Monde de la FIFA au Brésil empochera 25 600 000 euros, l’équipe victorieuse des 24 Heures du Mans n’aura droit qu’à 40 000 euros plus 10 000 euros pour la victoire de catégorie, soit la même somme que le droit de participation payée par l’équipe. Le finaliste de la Coupe du Monde de la FIFA aura droit à 18 300 000 euros contre 25 000 euros au deuxième des 24 Heures du Mans.
Alors combien coûte une saison au plus haut niveau ? Là où les constructeurs LM P1 ne sont pas limités en termes de coût, les constructeurs LM P2 doivent respecter un prix maximum de 370 000 euros sans moteur, avec la possibilité de proposer un kit Le Mans « low drag » pour 10 000 euros maximum et quelques évolutions dont le total est plafonné à 35 000 euros. A titre de comparaison, une Porsche 911 RSR coûte plus de 750 000 euros.
Nous avons contacté différentes équipes pour avoir une idée de ce que pouvait coûter une saison en LM P2. Pour une écurie souhaitant rouler en FIA WEC avec une auto, l’ordre de grandeur se situe entre 2,5 et 3 millions d’euros, soit environ le coût d’un engagement en GTE-Pro. On parle d’environ un million d’euros pour une saison en ELMS, le montant global avoisinant les 2 millions si on y rajoute Le Mans. « L’amortissement d’une auto se fait généralement sur trois ans » nous confie un propriétaire d’équipe. « Mais cela peut aller au-delà. Il faut compter 700 à 800 000 euros environ pour les 24 Heures du Mans, avec les pièces, le personnel supplémentaire, les pneumatiques, le carburant, l’hébergement, la logistique, les frais annexes, etc… La note monte vite. Cela représente environ 30% d’un budget d’une saison FIA WEC et 35 à 45% d’une saison ELMS. »
Pour Le Mans, il faut trouver plus de 600 000 euros soit environ 200 000 euros par pilote, ce qui n’est pas une mince affaire par les temps qui courent. A une époque où les gentlemen financent la majorité des plateaux, cela laisse sur le carreau des pilotes professionnels qui n’ont aucun budget à amener et qui ne veulent surtout pas tomber dans l’engrenage du pilote payant, ce qui est une sage décision. Même les pilotes paient (très cher) pour rouler en Formule 1.
Avant de prendre part à des courses, il faut déjà boucler des séances d’essais et là aussi il y a un coût non négligeable. Si on prend l’exemple de trois journées d’essais en Espagne ou au Portugal avec une LM P2, il faut sortir de 80 à 100 000 euros pour boucler environ 700 km/jour. Il faut compter les frais de déplacement, la location de la piste, les pneus, l’usure de la voiture, les pièces, les techniciens, l’hébergement. On parle de 8 euros/km pour le moteur.
Même si les équipes ont mis en place un budget prévisionnel, les aléas économiques peuvent faire qu’il soit compliqué d’assurer. Les partenaires peuvent régler avec du retard, les pilotes se désister. Il est bien loin le temps où 80% des pilotes étaient payés pour faire leur métier. Il n’y a guère qu’en SUPER GT (GT500) où c’est toujours le cas.
On peut donc comprendre la difficulté des équipes. De plus, les suppléants sont encore plus dans l’incertitude puisque ces écuries dans l’attente ne peuvent pas garantir d’une sélection à leurs pilotes et partenaires.
Le dernier communiqué de l’ACO indique bien la présence de 56 autos au départ des 24 Heures du Mans malgré plus aucun suppléant sur la liste. Il se dit tout de même qu’en cas de défection tardive, quelques équipes seraient prêtes à entrer en scène.