Le Mans

Frédéric Sausset : “Je ne me considère pas comme handicapé…”

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Frédéric Sausset était aujourd’hui au Mans pour présenter son projet « Participer aux 24 Heures du Mans en 2016 ». Nous avons déjà évoqué ce projet dans nos colonnes ici

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Frédéric Sausset a donc été amputé des quatre membres en juillet 2012 à la suite d’une maladie et, malgré ce coup du sort, a donc eu l’idée de ce projet qui paraît un peu fou au départ. Il a donc ce lundi 31 mars exposé aux media le projet en détail au troisième étage du Module Sportif de l’Automobile Club de l’Ouest  du circuit du Mans.

Frédéric Sausset :  « A la suite d’un accident domestique, j’ai été attaqué par une bactérie très violente qui m’a amené à être amputé des quatre membres en l’espace de 48 heures. (Olivier Sausset, qui était Chef d’Entreprise dans le Loir-et-Cher, a été amputé des deux jambes au niveau des genoux, et des deux bras au-dessus du coude).

J’ai eu ensuite une longue bagarre avec moi-même pour trouver la force de survivre. J’ai entamé très vite un processus de rééducation et je dois dire que mes prothèses m’ont bien aidé, alors que certains m’avaient dit que je ne pourrai plus remarcher. Il fallait que je trouve des clefs pour exorciser mon état et que je retrouve la joie de vivre.

J’ai toujours été passionné par le sport automobile. Pour moi, les 24 Heures constituent ce qui fait de mieux dans le domaine, d’autant que j’ai toujours été passionné par l’endurance. J’ai donc commencé à prendre des notes sur ma tablette pendant que j’étais à l’hôpital et j’ai commencé à parler à des gens autour de moi, en cherchant des gens compétents.

Parmi ces gens compétents, il y a évidemment Christophe Tinseau, nous sommes du même département. J’ai commencé à structurer le projet afin de pouvoir aller de l’avant. Evidemment, un des principaux problèmes, un des principaux obstacles à ce projet, c’étaient les autorisations et j’ai eu la chance d’avoir Vincent Beaumesnil, le Directeur Sport de l’ACO, pour m’aider dans ce sens, étant très intéressé par le projet, de même que l’Automobile Club de l’Ouest.

Il fallait évidemment tout d’abord travailler pour trouver une solution afin que je puisse continuer à piloter. J’ai tout d’abord imaginé un système que j’ai monté dans la voiture de ma femme. C’était un peu bricolage, j’avais scotché mes prothèses aux pédales de la voiture !

J’ai amélioré le système que j’ai adapté sur une Audi RS3 et j’ai pu profiter des conseils de Christophe Tinseau avec qui j’ai pu m’étalonner, pour finir au bout de quelques séances, tourner à un peu moins de trois secondes de Christophe, ce qui m’a encouragé dans ma démarche (Christophe, avec qui nous nous sommes entretenus après la Conférence, nous a confirmé ces chronos, lui ayant tourné dans les 2’02’’ sur le Bugatti avec l’Audi tandis que son élève était dans les 2’05’’. Christophe s’est déclaré impressionné par la faculté d’adaptation de Frédéric Sausset, qui a progressé de 10 secondes au tour en quatre séances). Ceci donnait de la crédibilité au projet.    

En dehors de mon projet personnel, qui consiste à retrouver du plaisir, j’ai également d’autres objectifs. Je souhaiterais créer une formation pour les handicapés, afin qu’ils puissent eux aussi piloter de nouveau, et pourquoi pas  créer un championnat pour handicapés.

Il faut montrer que ce n’est jamais fini, qu’il faut passer outre le handicap. A l’hôpital ou au centre de rééducation, j’ai vu trop de jeunes non seulement atteints physiquement mais peut-être encore plus moralement. C’est cela qu’il faut combattre.

Mon état physique, pour moi c’est positif. Si j’étais resté valide, je n’aurais jamais espéré ni même pensé courir les 24 Heures du Mans ! »         

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Frédéric Sausset a ensuite répondu aux questions des media.

Interrogé sur le système d’aide au pilotage, il a précisé que ce système avait été développé par deux manceaux. C’est un système assez simple, deux tiges servant de relais pour les jambes. La cuisse droite sert pour accélérer, la cuisse gauche pour le freinage. Une prothèse est fixée sur le bras droit et est reliée au volant, alors que le bras gauche n’a pas de prothèse et ne sert pas, car il serait impossible à Frédéric Sausset en raison de l’amplitude du volant de croiser les bras. Ce sera plus simple sur un prototype, déclare-t-il, car il y a moins d’amplitude.

La préparation pour 2016 : C’est évidemment une des exigences pour pouvoir courir au Mans. Frédéric Sausset et Christophe Tinseau estiment que la meilleure préparation pour Le Mans, c’est une saison en VdeV Endurance Series, qui est le seul championnat à offrir des courses d’endurance pour les protos, avec des courses de six et même huit heures, et beaucoup de temps de roulage en essais. Un des problèmes à régler sera certainement la gestion du trafic, ce qui sera probablement le plus compliqué. 

Pour 2016, il faudra bien sûr passer à l’échelon supérieur et pour cela probablement passer par l’European Le Mans Series, car il s’agit – et Vincent Beaumesnil et l’ACO ont été clairs sur le sujet- d’être au niveau. Une participation à cinq ou six courses est envisagée, et bien entendu Le Mans si la candidature est acceptée et les capacités de Frédéric Sausset validées.

Système et sensations : avec le système adapté sur l’Audi RS3, F. Sausset peut conduire tous les jours. « J’éprouve les mêmes sensations au volant que lors que j’étais valide. Le seul problème, c’est que je ne peux pas monter dans la voiture ni en sortir seul », ajoute-t-il. Sur un prototype, il y aura du travail à faire, car la position de conduite est différente, mais a priori ce n’est pas problématique. Il faudra innover, car une des contraintes liées à l’état physique du pilote est la nécessité d’avoir une boîte de vitesses totalement automatique, ce qui n’existe pas actuellement sur un proto. Christophe Tinseau « Ce n’est pas  un obstacle insurmontable, c’est une histoire de calculateur, on a commencé à y penser. »

Pourquoi le proto et pas le GT ? Frédéric Sausset : « Il fallait que le défi soit à la hauteur, donc comm en LMP1 il n’y a pas de place pour moi, donc j’ai choisi le LMP2. » A première vue, on pourrait croire que le pilotage d’une GT aurait été plus adapté, mais en fait cela devrait être plus pratique avec un proto. En outre, en cas d’extraction du pilote, ce serait moins compliqué avec un proto ouvert qu’avec une GT.   

Avis des médecins : Vincent Beaumesnil précise que Frédéric Sausset a rencontré des  médecins de l’ACO et de la FIA et que ces experts sont bien au courant du projet et le soutiennent. Le Docteur Alain Chantegret, responsable de la délivrance des licences, suit de près le programme.

Echos au projet : Le programme de Frédéric Sausset a déjà suscité beaucoup d’intérêt. Dans l’assistance, on notait la présence de  Patrice Lafargue, Président du Groupe IDEC –Promoteur, Constructeur, Investisseur-. Patrice Lafargue est lui-même pilote, il court actuellement en VdeVEndurance Series, en GT avec une Porsche 911 GT3 R du Ruffier Racing, et en Protos avec une Ligier JS53 EVO du OAK Racing, après avoir couru auparavant en ELMS et même au Mans en 2011. Etait également dans la salle Sébastien Loeb, le nonuple Champion du Monde WRC. Celui-ci précisait qu’il était là à titre personnel, intéressé par le projet, et non au titre du Sébastien Loeb Racing.   

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Des modèles ? A la question de savoir s’il avait été inspiré par des exemples comme celui de Alessandro Zanardi, Frédéric Sausset répond que s’il a été très admiratif  par rapport à Zanardi, ce n’est pas cela qui l’a motivé, mais sa propre réflexion personnelle.

Budget ? C’est une question primordiale. F.Sausset se fait aider par des professionnels pour évaluer l’enveloppe nécessaire. De nombreux contacts sont déjà en cours. L’estimation n’est pas encore définitive, puisque le projet n’en est qu’à ses débuts. La fourchette doit cependant tourner autour d’un montant de 2,5 Millions d’euros (roulage, engagements, courses…), ce qui demande bien sûr beaucoup de travail.

Frédéric Sausset s’est pour l’instant entouré d’une structure d’amis au sein d’une Association Loi de 1901, SRT 41. Au fur et à mesure de l’évolution du projet, cette association devra nécessairement prendre une forme plus professionnelle. Pour Le Mans 2016, en cas de participation, Christophe Tinseau épaulera Frédéric Sausset, les deux hommes étant assistés par un autre pilote confirmé.    

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Pour conclure, Frédéric Sausset déclare « Je ne me considère pas comme handicapé. »

Respect et admiration….Nous suivrons bien entendu de très près ce projet.

 

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