Alors que les 6 Heures de Shanghai (4-6 novembre) – pénultième manche du championnat du monde d’Endurance FIA 2016 et de l’histoire de la marque Audi en Sport-Prototype – n’ont pas répondu à leurs espérances, Benoît Tréluyer et ses équipiers Marcel Fässler et André Lotterer ont déjà le regard tourné vers Bahreïn.
En dépit de l’annonce, mercredi 26 octobre, du retrait de la marque aux anneaux au terme de la présente saison, l’ambiance est des plus studieuses dans les rangs de l’écurie Audi en ce début de week-end chinois. Pour les hommes du Docteur Ullrich, il n’est pas question de se laisser submerger par l’émotion.
« Nous avons une équipe extraordinaire et même après l’annonce qui, forcément, n’est bonne pour personne, tout le monde est extrêmement motivé, souligne Benoît en pénétrant dans le vaste paddock de Shanghai. La tristesse est là, on peut la deviner au hasard des regards que l’on croise, mais chacun s’attache à ne rien laisser paraître. En amont de l’épreuve, un travail colossal a été effectué. »
Hélas, dès les premiers essais libres, il apparait que l’Audi R18 n°7 du pilote normand et de ses équipiers souffre d’un mystérieux manque de performance.
« Nous perdons beaucoup en ligne droite, et en sortie de virage, explique le natif d’Alençon. Nous sommes derrière la voiture sœur, mais plutôt bien au niveau des réglages du châssis avec une bonne vitesse de passage en virage. C’est ce qui nous a poussés à sacrifier légèrement les qualifications pour pouvoir bénéficier de pneumatiques neufs à chaque relais.
Nous avons constaté que la dégradation est élevée et qu’il est difficile de retrouver du grip en repartant des stands avec un set de pneus déjà utilisé. Il s’agit certes d’une spécificité du Circuit International de Shanghai, mais nous n’en avions jamais fait une telle expérience auparavant. »
Malgré cela, la confiance reste de mise avant la course. Sur les longs relais, la voiture est capable de tenir le rythme et les trois amis ont à cœur de démontrer le potentiel de leur bolide.
« André a connu un peu de difficultés en début d’épreuve, confie Benoît. L’équilibre de la voiture et le grip n’étaient pas optimaux. Malgré tout, il a réussi à s’accrocher au groupe de tête. Son deuxième relais était mieux, même si les problèmes d’équilibre persistaient. L’écurie a tenté de les résorber et, quand je suis monté dans la voiture, ça allait mieux.
J’ai eu un peu de mal lors des premiers tours mais quelques nouveaux ajustements ont fonctionné et, de mon côté, j’ai compris comment exploiter la voiture. Mon deuxième relais était très bien et nous étions même légèrement plus rapides que la n°8 de nos camarades. »
Alors qu’elle a évolué aux avant-postes en début d’épreuve, la course de l’Audi sœur est perturbée par un problème de ravitaillement avec un débit moins important que prévu, et elle évolue désormais avec un tour de retard.
« Oliver [Jarvis] était un tour derrière tandis que nous étions en train de nous battre avec la Porsche n°2 et la Toyota n°6, ajoute Tréluyer. Même si nous étions un peu loin, nous espérions continuer de progresser. Cependant, Oliver n’a pas compris la situation et m’a percuté alors que j’étais en train de dépasser des GT. »
Vingt-cinq minutes sont ainsi perdues au stand pour réparer la connexion « air jack » endommagée dans le contact. Pour le trio Tréluyer-Fässler-Lotterer, la chasse au podium s’arrête là.
« C’est dommage pour le team, regrette Benoît. Sur le coup, je n’étais vraiment pas content. Ce sont des choses qui ne devraient pas se produire. Bon, c’est tout de même arrivé, et il faut passer à autre chose. Tout le monde fait des erreurs. »
D’erreurs, il ne faudra pas en commettre au Royaume de Bahreïn dans moins de deux semaines (17-19 novembre) pour ce qui sera la toute dernière course d’Audi en Endurance après 18 ans au sommet. Un rendez-vous que Benoît tient à ne surtout pas manquer.
« J’espère que nous allons résoudre le problème rencontré ici et allons pouvoir exploiter le plein potentiel de la voiture, déclare le triple vainqueur des 24 Heures du Mans. Nous étions moins bien que prévu en Chine alors que Porsche et Toyota étaient mieux que ne le laissaient supposer nos prédictions.
Jusqu’à présent, nos simulations s’étaient toujours révélées exactes. On va reprendre les calculs et tout analyser afin d’arriver au Moyen-Orient avec une voiture capable de gagner. Sur le papier, le circuit de Sakhir n’est pas idéal pour notre catégorie mégajoules mais notre R18 fonctionne bien sous des températures élevées, alors nous espérons montrer un visage compétitif. »
Une dernière fois, les hommes du Docteur Ullrich retiendront leurs larmes… au moins jusqu’au drapeau à damier.
« Ce que l’on veut, c’est gagner ! conclut Benoît. L’émotion, on la laissera nous envahir après la course ! »