Avec Audi qui quitte le navire FIA WEC, le championnat perd sa marque la plus emblématique. Contrairement à Peugeot qui était parti à la toute dernière minute, Audi Sport sort la tête haute pour tout ce que la marque a amené à la discipline. Présent aux 24 Heures du Mans depuis 1999, la firme allemande n’a plus rien à prouver. Entre TFSI, TDI et Hybride, Audi a été de tous les combats, aussi bien face à Henri Pescarolo que Peugeot, Toyota ou Porsche. On attendait un retrait fin 2017 et les propos tenus le week-end dernier à Estoril par Gérard Neveu et Pierre Fillon laissaient présager que ce retrait annoncé dans la presse n’était qu’une énième rumeur supplémentaire. Le FIA WEC et Le Mans vont donc devoir se passer d’une marque qui a fortement contribué au lancement du championnat, via son emblématique patron le Dr Wolfgang Ullrich. Tout porte à croire que la décision a été prise ces dernières heures malgré les nombreuses rumeurs (fondées) depuis Fuji.
Les soucis rencontrés par Volkswagen Group ne sont pas étrangers à cette restructuration, d’autant plus que la justice américaine a autorisé une amende record de 15 milliards de dollars (14,7 milliards de dollars plus exactement) suite au scandale des émissions. On a eu beau nous dire que le programme FIA WEC n’était qu’une goutte d’eau sauf que quand vous devez régler une facture supérieure à 10 milliards, chaque économie compte. De plus, Audi a toujours été clair, le LM P1 ne devait passer que par le diesel. Quand le groupe est englué dans un scandale lié au diesel, faire courir des autos équipées de cette technologie aux quatre coins du monde fait mauvaise publicité.
Exit l’hybride et bonjour l’électrique. Audi va tenter de se refaire une virginité en allant en Formula E sur un programme qui coûte actuellement dix fois moins cher que le LM P1. Porsche et Toyota vont donc combattre entre eux, ce qui laisse seulement quatre autos pour la gagne. On revient dans le schéma 2012 où Audi luttait face à Toyota. Avec deux constructeurs engagés à l’année, le FIA WEC garde son label mondial FIA.
L’arrivée des constructeurs permet un apport supplémentaire de finances mais elle a tué les privés pour la victoire. Il était utopique de penser qu’un privé allait gagner Le Mans avec dix fois moins de moyens. Allez demander l’avis d’Henri Pescarolo ou de Bart Hayden. La conjoncture économique fait que même les plus grands groupes peuvent partir sans prévenir quasiment du jour au lendemain. Le Board d’un constructeur n’est pas une équipe de course. La question à se poser est de savoir qui va venir lutter contre les deux constructeurs en place sachant qu’il faut partir de zéro et mettre sur la table plusieurs centaines de millions d’euros. Peugeot y pense, mais les coûts doivent baisser drastiquement. Le troisième système hybride et les 10 MJ ne vont pas dans ce sens. Il va donc falloir se creuser la tête pour faire venir d’autres marques sans faire partir celles en place.
Le retrait soudain d’Audi va certainement faire réfléchir la concurrence. Est-ce que Toyota va toujours s’intéresser à mettre une troisième auto au Mans ? Si Toyota en met une troisième, Porsche en fera-t-il de même du fait de l’absence d’Audi ? Suite au forfait du Rebellion Racing en 2017, voir une LM P2 sur le podium des 24 Heures du Mans n’est plus du domaine du rêve. Il va surtout falloir travailler pour l’avenir afin de séduire tout en étant raisonnable sur les coûts. Il faut faire rêver le public et exciter les constructeurs à venir en Endurance. Tout le monde se prend à rêver de ‘prototypes GT’, et nous les premiers.
En attendant, il va falloir reclasser le personnel et les pilotes Audi Sport. Sur les six titulaires, trois ont déjà un programme complémentaire. Les places en LM P1 ne sont pas légion. il faudra donc chercher ailleurs : LM P2, SUPER GT, GT3, IMSA. Le site Internet du Joest Racing recrutait ces derniers jours mais l’annonce a subitement disparu depuis ce matin.
En mettant un terme à son programme majeur en sport automobile, Volkswagen fait donc une coupe franche dans son budget compétition. A Wolfsburg, on semble bien connaître le prix d’un pain au chocolat…