Après avoir opéré discrètement en direction de course (ici), nous avons voulu en savoir plus sur les commissaires sportifs qui sont indispensables au bon fonctionnement d’une course automobile. SRO et la Blancpain GT Series ont accepté notre présence lors des briefings des teams managers et des pilotes, mais aussi de voir comment se prennent les décisions sportives. Les commissaires sportifs ont en quelque sorte la fonction de gendarmes des meetings. Comme la direction de course, ils sont amenés à prendre des décisions pouvant être lourdes de conséquence pour les équipes et les pilotes.
Un seul commissaire sportif ne prend pas la décision de sanctionner, c’est pourquoi trois personnes composent le collège en Blancpain GT Series. Il peut y avoir des divergences d’où une concertation avec à la tête un président. Pour les 24 Heures de Spa, ils seront six avec deux groupes de trois. Être commissaire sportif demande d’avoir une vision de la course impartiale et ne permet aucun relâchement. Lorsqu’un fait arrive, les commissaires discutent sur la procédure, reçoivent la ou les personnes concernées en direction de course en matière de dépassement sous drapeau jaune, respect des limites de la piste ou excès de vitesse dans la voie des stands. Les contacts peuvent être jugés après la course, le temps de visionner les caméras embarquées. « Nous avons en quelque sorte le même pouvoir que la justice » nous a confié Marc Janssen, président du collège des commissaires sportifs en Blancpain GT Series. « A la différence près que nous nous référons au code sportif. On forme un tribunal qui travaille comme une vraie équipe. Tout est fait en Anglais même lors d’une course en France. »
Cela ne vous aura pas échappé que des réclamations peuvent être faites à l’issue d’une course. On l’a vu à maintes et maintes reprises. « On reçoit la réclamation avec un droit financier qui varie en fonction des pays » poursuit Marc Janssen. « On discute, on écoute. Si le plaignant est dans son bon droit, l’argent est rendu. Il est aussi possible d’aller en appel. Pour la Blancpain GT Series, c’est le RACB qui rend son verdict. Il y a ensuite la possibilité de se défendre avec un appel international. Le commissaire sportif a deux fonctions principales bien établies en étant juge et notaire. » Le commissaire sportif ne se contente pas d’étudier les fautes, il est aussi le garant de tous les documents qui sont publiés et signés. Sans la signature, les documents ne sont pas valables.
« Nous avons le pouvoir de sanction en appliquant le règlement en fonction des faits » explique Marc Janssen. « Si on prend l’exemple de la Q3 en Blancpain Sprint Cup au Nürburgring où une McLaren a été pénalisée pour overboost, le temps de la séance a été annulé. Nous avons de plus en plus de responsabilités qui demandent des connaissances techniques. Il faut étudier des données et des images. Le gros avantage en Blancpain GT Series est que les commissaires sportifs sont en direction de course. »
L’échelle des pénalités est variable. Elle va de l’avertissement à la réprimande officielle en passant par une pénalité en temps. Il est même possible d’aller jusqu’à l’exclusion de la course et d’un meeting. Un pilote peut être amené à rouler dans deux séries sur un même meeting, d’où une exclusion générale. « Il faut avoir l’esprit de la série » confesse le président du collège des commissaires sportifs. « Il y a un vrai esprit Blancpain GT Series et on se doit d’apprécier chaque cas à sa juste valeur. »
« Track limits ». Ces deux mots sont connus de tous les pilotes et de toutes les équipes. Les bacs à graviers ont tendance à disparaître pour laisser place à des surfaces asphaltées, ce qui donne plus de travail aux contrôleurs : « Les ‘tracks limits’ sont le cancer du sport automobile. Pour la Formule 1, les bacs ont été remplacés par du bitume. Il faut surveiller les pilotes et les pénaliser si besoin est. On pénalise après deux faits. La règle générale est d’avoir au moins une roue sur la piste avant la ligne blanche. » La pénalité la plus courante reste le drive through. Le passage par les stands se paie cash car il est irrécupérable avec l’impossibilité de faire appel.
La mission des commissaires sportifs n’est pas de faire de la prévention même si un volet éducatif existe, notamment pour les jeunes pilotes. « Les pilotes nous connaissent et les commissaires sont généralement considérés comme des méchants car on les pénalisent. Il faut juste expliquer les choses. »
Dans une corporation qui reste assez fermée, il n’est pas évident de recruter de nouvelles têtes. A la différence du directeur de course qui est rémunéré mais qui est responsable pénalement en cas de problème grave, le commissaire sportif ne touche pas un centime. Si on prend l’exemple de la Belgique, un commissaire sportif est désigné stagiaire durant trois ans avant de passer un examen oral devant des commissaires. En fonction des licences, il est possible d’officier sur toutes les courses internationales, hors FIA (la FIA a ses propres commissaires).
Comme le directeur de course et les commissaires qui oeuvrent en bord de piste, le commissaire sportif est un maillon essentiel de chaque meeting comme l’est son homologue pour la partie technique. De plus en plus de championnats publient les décisions sportives pour plus de transparence et informer le public.
Tous nos remerciements à SRO et la Blancpain GT Series pour avoir accepté notre présence dans des lieux interdits en règle générale à la presse. Il n’est pas question de tout révéler mais cette immersion a le mérite de mieux comprendre les rouages d’un meeting, d’éviter d’écrire quelque chose de faux et de savoir à qui s’adresser directement pour une quelconque question sportive.