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Gros plan sur la BOP, part 3…

MOTORSPORT : FIA WEC - 24 HOURS OF LE MANS (FRA) - ROUND 3 06/12-19/2016
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Après vous avoir expliqué le principe de fonctionnement d’une BOP puis les explications de Geoff Carter, directeur technique du championnat IMSA, passons aux choses qui fâchent. Vous pourriez nous dire qu’une BOP enlève une partie du sport et on ne peut pas vous donner tort.

La catégorie GTE est réputée pour être la ligue 1 du GT. Hors, en Ligue 1, on ne trouve que des clubs de Ligue 1. Alors pourquoi étalonner des autos sous prétexte qu’elles ont une architecture différente ? On ne pénalise pas le PSG qui a des moyens colossaux face aux petites équipes. La catégorie GT3 est réservée à la compétition-client où l’on trouve en majorité des Pro-Am, un peu comme la Ligue 2 en football. Là, avoir une BOP est dans la logique des choses. Allez dire au PSG : “vous avez trop d’avance, donc la saison prochaine, vous partez avec un handicap de 10 points”. Certes, la comparaison est un peu forte mais on ne pense pas être totalement dans le faux.

On ne peut pas blâmer le législateur qui fixe les règles de départ. Si les constructeurs viennent, c’est bien qu’ils y trouvent leur compte. “Quand on met le doigt dans la BOP, on sait de toute façon que le côté politique entre en jeu” nous a confié un ingénieur présent en GTE. “C’est rageant car vous avez beau tout donner, vous savez que le coup suivant, on peut vous pénaliser. Le postulat de départ devrait être : que le meilleur gagne ! En 1970, Porsche a gagné 11 des 12 courses du Championnat du Monde d’Endurance. Ils ont juste perdu à Sebring et personne ne s’est plaint. La Porsche 917 était une meilleure auto que la Ferrari 512, un point s’est tout. En GTE, on met en avant le nec de la technologie GT. Le sport automobile est une combinaison voiture – pilote – équipe. A force de vouloir contenter tout le monde, on contrarie tout le monde.”

Avec des GTE de plus en plus pointues, sans oublier l’arrivée des moteurs turbocompressés, le législateur a de plus en plus de travail. “Il n’est pas question de dire que les contrôleurs ne savent pas faire leur métier” nous a déclaré le patron d’une marque impliquée en GTE. “L’exercice est compliqué et je tiens à souligner tout le travail fourni. Les données peuvent être récupérées en temps réel, ce qui facilite les choses. Le revers de la médaille est qu’il faut analyser le tout avant de prendre une décision. Il faut du temps et des personnes dédiées à cela. On a pu voir aux 24 Heures du Mans que la BOP était sujette à polémique.”

Les autos ont été réajustées la veille de la course, ce qui n’a pas été sans faire grincer des dents. En retrait lors de la Journée Test, les Ford GT ont montré les crocs aux essais. Les Ford et Ferrari ont dominé la catégorie GTE 50 ans après avoir fait la même chose pour la gagne. Cette année, on fait cohabiter des ‘anciennes’ GTE avec des nouvelles. Aston Martin, Corvette et Porsche ont apporté quelques changements contrairement à Ferrari et Ford qui font confiance à une nouvelle auto. La BOP doit permettre d’équilibrer tout le monde mais il en manquait sur les 13,629 km du circuit sarthois. On ne pense pas que les pilotes Corvette et Porsche ont régressé par rapport à 2015. Aston Martin doit continuer à comprendre ses nouvelles gommes. Avec une BOP désavantageuse, il a fallu prendre des risques pour ne pas se faire décrocher. Les 911 RSR ont animé le début de course compte tenu des conditions de piste grâce à un choix de gommes judicieux, avant de rentrer dans le rang. Résultat, les pilotes Porsche ont attaqué comme des beaux diables et les 911 RSR n’ont pas supporté. Chez Corvette, c’est Tommy Milner qui est parti à la faute en attaquant tout ce qu’il pouvait.

“A force de jouer à ce jeu, un constructeur peut être amené à partir en pensant que cela ne sert à rien de jouer si on pénalise celui qui fait du bon travail” nous a déclaré un ingénieur. “Au contraire, s’ils perdent, ils savent que c’est à cause d’une auto moins bonne et il y a fort à parier de retourner sur la planche à dessin. C’est ça la compétition. Que la Ford GT soit devant est tout à fait normal. L’auto est un prototype déguisé en GT avec très peu de compromis. De plus, c’est une voiture récente. Il n’y a pas besoin de la regarder longtemps pour comprendre que le concept général est bon. Multimatic sait faire du très bon travail. On ne peut quand même pas blâmer les ingénieurs d’avoir fait du bon travail. La seule chose que l’on peut regretter est de ne pas avoir tout montré dès le début.”

Pour faire face à ce jeu de cache-cache ‘sandbagging’, il est possible de pénaliser les contrevenants. Aussi bien à Daytona qu’au Mans, une marque qui aura montré un visage différent des données récoltées peut être arrêtée en fin de course pour marquer une pénalité. Jusqu’à présent, personne n’a pris cette décision.

De nombreux paramètres sont pris en compte pour l’établissement de la BOP. “Est-ce que la rigidité du châssis est mesurée ?” nous lâche un pilote officiel. “Même chose pour la hauteur du centre de gravité. Est-ce que la configuration aéro et la rigidité des suspensions sont les mêmes lors des essais de début de saison qui sont faits en ligne droite qu’en course ? Est-ce que les données de mesures embarquées sont vraiment celles lues par la télémétrie ? La liste est longue…”

La seule chose que l’on peut affirmer, c’est qu’il sera de toute façon difficile de contenter tout le monde…

 

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